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Pour une fraction de seconde, la vie mouvementée d’Eadweard Muybridge, la BD qui stoppe le temps
Série : –
Titre : Pour une fraction de seconde, la vie mouvementée d’Eadweard Muybridge
Auteurs : Guy Delisle (scénario, dessins et couleurs)
Éditeur : Delcourt
Collection : Shampooing
Année : 2024
Pages : 208
Résumé d’une vie consacrée à l’image:
En 1855, beaucoup de gens s’interrogeaient sur le mouvement réel effectué par un cheval au galop. Mais nul ne parvenait à l’observer clairement, ni les artistes, ni les scientifiques, ni les passionnés de chevaux. Le mystère restaient entier et les disputes continuaient. Cette même année 1855, Eadweard Muybridge, âgé de vingt-cinq ans, laisse son Angleterre natale et sa mère et s’embarque pour les États-Unis afin de trouver le succès. Ce dernier arrivera plus tard que prévu et d’une manière inattendue…
Le scénario de la grande et de la petite histoire :
Guy Delisle mêle la vie d’Eadweard Muybridge aux grands événements historiques qui se déroulent en parallèle. Bien sur, il y a un sens global, le développement de la photographie et du cinéma, l’image fixe et en mouvement, leur impact sur la peinture, la science et leur utilisation dans différents domaines. Et là-dessus, Muybridge a eu une influence puisqu’il a inventé la chronophotographie. Vous me direz, « mais qu’est-ce que la chronophotographie ? ». Il s’agit de plusieurs appareils placés cote à cote qui prennent chacun une photo à la suite dans un temps très court. Par exemple, celui d’un cheval au galop, pour voir toutes les étapes du mouvement.
Ne vous inquiétez pas, c’est beaucoup mieux expliqué dans la BD, et surtout très bien représenté.
L’auteur ne se fixe pas seulement sur l’axe historique, scientifique, mais sur le quotidien de Muybridge, un quotidien qui prend vite des allures extraordinaires. D’une part à cause des risques insensés pris pour réaliser une photo, à une époque où le matériel pesait plusieurs kilos à transporter, sans compter tout ce qu’il fallait pour le développement, et d’autre part à cause des drames incroyables qu’il a vécus, survivant d’un accident de diligence ou encore homme trompé qui va se venger dans le sang.
La BD relate de manière simple cette vie et l’histoire avec un grand H. On passe des galères de Muybridge aux inventions de Niepce et Daguerre sans être surpris. Et on revient à la vie de Muybridge. Guy Delisle parvient à nous emmener dans ce récit en liant discrètement Histoire et biographie. La BD, art séquentiel, a tout le potentiel de rendre hommage à la chronophotographie. Aussi Guy Delisle ne se prive pas, dans les moments intenses, de jouer avec la dilatation du temps.
Le recueil se finit sobrement par un diagramme plaçant sur l’échelle des années la vie des personnages intervenants dans la BD.
Le dessin sobre:
Guy Delisle garde son style habituel, personnage stylisé qui évolue dans des compositions de planches simples. Il joue sur la mise en scène pour donner de l’ampleur graphique à l’histoire. Il adopte des tons gris dans un noir et blanc simple, nous projetant ainsi dans les tons des photos anciennes. Et justement, pour créer des aérations, Guy Delisle utilise ces premières photos historiques, qu’elle soit de Niepce, Daguerre, Muybridge et d’autres encore, pour nous replonger dans l’époque.
Il joue sur le temps éclaté que permet la BD, et utilise de manière pertinente et dramatique les effets que va inventer Muybridge.
Il arrive que certaines cases fassent intervenir la couleur, pour mieux faire ressortir les émotions des personnages, quand Muybridge perd tout contrôle et entre dans une rage folle, par exemple. Ou alors, pour marquer les époques : la BD se finit par un retour au présent où apparaissent les couleurs.
Conclusion d’une BD bien menée:
Un récit qui nous fait découvrir non seulement une vie intense, folle mais aussi l’histoire de l’évolution de l’image fixe vers l’image animée, mêlant le développement de la photo et du cinéma.
Zéda rencontre Eadweard Muybridge.