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L’animateur, la BD d’une rencontre émouvante



Titre : L’animateur
Auteurs : Juanango (scénario et dessin)
Éditeur : Delcourt
Collection : Shampooing
Année : 2023
Pages : 256
Résumé d’une BD au carrefour de deux vies :
Buenos Aires, Argentine, 2003. Dans le cabinet d’un médecin, un frère et une sœur attendent. Ils sont finalement reçus et voient leur crainte se réaliser, le cancer d’un membre de leur famille, Neno, s’est aggravé. Ils n’ont pas les moyens mais décident d’engager un infirmier de nuit pour veiller sur lui. Neno est farouchement opposé à cette intrusion dans sa vie. Mais la maladie ne lui laisse pas le choix. Comment vont s’entendre le jeune infirmier un peu pataud et le malade récalcitrant ?
Le scénario d’un récit humain:
La relation entre Neno et son infirmier constituent le cœur du récit. Un autre élément va entrer en scène, Neno reçoit une commande publicitaire. En effet, Neno est animateur. Un domaine que ne connaît pas son infirmier, mais qu’il va tâcher de comprendre pour se rapprocher de son patient. Car le jeune homme, très sensible, va s’attacher au malade et souffrir des sarcasmes de Neno à son égard.
Cette BD très touchante nous plonge au cœur de l’humain. L’approche de la fin pour Neno, qui doit l’affronter en compagnie d’un homme qu’il ne connaît pas spécialement et dont il se sent loin. Et cette même fin de vie à laquelle est confronté l’infirmier, qui va tenter d’adoucir les derniers jours de son patient, mais qui va devoir aussi supporter l’approche de la mort dont il sait qu’il sera probablement le témoin.
Les deux personnages sont émouvants dans leurs différences sur ce même chemin qu’ils prennent ensemble.
Leurs caractères bien tracés, leurs angoisses, leur joie sont retranscrits dans ces moments du quotidien qu’ils doivent apprendre à gérer ensemble.
On découvre le métier d’animateur en même temps qu’on réalise que Neno est sur son dernier contrat. Mais à voir Neno brûler de sa passion pour l’animation et tenter de surpasser la douleur pour réaliser un beau mouvement, on comprend ce qui a animé le personnage sa vie durant.
La BD comporte un cahier final où Juanungo, l’auteur, explique que son père était animateur et qu’il est décédé d’un cancer. On comprend mieux comment ces personnages se révèlent si vivants, il y a une part de vécu que leur injecte l’auteur, même si le récit demeure fictif.
Une BD sur l’approche de la mort et sa gestion, sur le combat contre la douleur, sur le lien d’amitié qui se noue entre un patient et son infirmier. Tout cela parvient à nous émouvoir, avec l’aide d’un dessin au crayon.



Le dessin d’un crayonné léger :
Juanungo réalise d’un trait leste cette BD, il opte pour le crayon de papier et pour un gris et blanc maîtrisé. Son style semi-réaliste prend vie en quelques traits, rehaussé par un travail d’estompe du gris qui permet d’apporter du relief, des volumes à certains endroits tandis qu’à d’autres, il pose l’obscurité naissante de la nuit.
Des cases aux traits tremblants, qui nous rappelle la fragilité de la vie et de ces instants saisis sur le vif. Un cadrage simple, efficace, nous maintient avec les personnages. On prend un peu de distance quand on est dans la rue, rares respirations dans ce récit, mais tout se resserre dès qu’on revient dans l’appartement de Neno.
Une belle composition sur la dernière partie de la BD, où le récit alterne avec les dessins de la dernière animation de Neno, qu’on peut, après la lecture, refaire défiler comme un flip book. Une idée qui prend son sens car elle est amenée tôt dans l’histoire au travers des échanges sur l’animation entre Neno et son infirmier.
Conclusion d’une BD au trait doux et à l’histoire dure:
Une histoire sur la fin de vie difficile à accepter, un sujet grave, mais réalisé d’un trait crayonné léger, qui crée un contraste faisant de cette BD une réussite.
Zéda croise Neno et son infirmier !


