Sommaire de l'article
Les Évaporés, la BD d’une disparition

Titre : Les Evaporés
Auteurs : Isao Moutte (scénario et dessins), d’après un roman de Thomas B. Reverdy
Éditeur : Sarbacane
Année : 2023
Pages : 160
Résumé d’une histoire croisée :
Un homme prend une valise et quitte sa maison, il rejoint un inconnu et ils partent en fourgonnette. Il laisse derrière lui son passeport, ses clés et sa femme… endormie. Il s’installe dans un quartier misérable à Tokyo.
Une jeune fille travaille comme serveuse et commet de nombreux impairs. Elle risque sa place mais a besoin de ce boulot pour financer ses études. Elle reçoit un appel de sa mère lui annonçant la disparition de son père.
Un jeune garçon assiste au meurtre de son patron par des yakuzas. Repéré, il doit s’enfuir et se réfugie dans un quartier misérable de Tokyo, celui où habite l’homme qui a tout quitté.
Le scénario d’une vie brisée :
trois personnages : Kaze, l’homme qui a disparu, Yukiko, partie étudier en France et Aikanu, le jeune témoin involontaire d’un crime. Au fil de l’histoire, nous découvrons les raisons et les événements qui les ont conduit là où ils sont aujourd’hui. Si l’on comprend assez vite le lien entre Yukiko et Kaze, c’est une relation inattendue qui se crée entre Aikanu et Kaze. Au-delà de cette histoire de fuite, c’est une vision du Japon des pauvres que nous dévoile Isao Moutte dans cette adaptation de roman.
Le phénomène des disparitions, l’après-Fukushima, le travail des journaliers en quête d’argent pour pouvoir manger, les yakuzas qui semblent omniprésents à différents niveaux de la société, sont les thèmes abordés dans cette BD.
Mais il ne s’agit pas d’un pamphlet social, l’histoire est construite sur des silences, des mouvements, elle offre son lot d’actions mais sait alterner ces moments de contemplations, où les personnages se perdent dans leur pensée et des moments d’échanges, dialogues restant concis, sauf dans la dernière partie de l’histoire. Mais c’est une manière pour l’auteur de nous donner les chiffres concernant les évaporés. C’est intéressant mais cela ralentit la narration, lui fait perdre un peu de sa fluidité, selon moi.
Afin de mieux comprendre ses trois personnages, des flashbacks nous dévoilent par petites touches leur passé.

Le dessin hachuré :
Un trait léger mais qui pose en détail tous les éléments des décors. Japon ou France, on sait vite où on est. A côté de ce trait précis, Isao Moutte travaille aussi avec les hachures. C’est sa manière de créer des ombres et de donner du volume à son dessin.
Les personnages sont réalisés dans la même technique, trait juste et hachures.
Le dessin est en noir et blanc, contrairement à la couverture nocturne qui tire vers des tons bleutés et rouge. Le noir et blanc laissant même une grande part au blanc, dans des cases demi-page richement détaillées, où le décor minutieux, sans être trop réaliste, contraste avec les ciel purs et vides de tous traits.
Les compositions sont resserrées sur les personnages, sauf dans ces moments de pause, de contemplation, où l’on prend conscience d’un endroit, d’un lieu.
Conclusion d’une BD touchante:
Cette adaptation du roman de Thomas B. Reverdy donne une BD émouvante, mystérieuse, qui nous dévoile une autre facette du Japon. A lire posément, pour entrer dans ce rythme ralenti…
Zéda rencontre Kaze.

Je vais la lire tout bientôt. Je trouve ce sujet incroyable. Je vais faire ça posément car grâce à ta chronique j’ai compris que je devais m’installer tranquillement avec un bon thé japonais pour mieux en profiter.
Oui, c’est une BD qui joue sur le contemplatif tout en adoptant une narration qui fait avancer l’histoire, un beau mélange qui mérite qu’on s’y attarde. Le graphisme noir et blanc de Isao Moutte est très beau, surtout sur ces grandes planches de vue d’ensemble.