Sommaire de l'article
Après le 13 novembre, la BD d’un long parcours
Titre : Après le 13 novembre
Auteurs : Sophie Parra, Davy Mourier (scénario), Gery (dessin)
Editeur : Delcourt
collection : Une case en moins
Année : 2022
Pages : 128
Résumé d’une BD surprenante :
13 Novembre 2015, des coups de feu, des gens s’étonnent de ces bruits inhabituels, une mère s’inquiète pour sa fille, un ami prend de nouvelles, les SMS s’enchaînent, sans réponse… Et pour cause, Sophie, qui était au bataclan ce soir-là, se réveille à l’hôpital. Elle a reçu deux balles, dont une près du bassin. Commence le début d’un long parcours de réadaptation, pas seulement à cause des dégâts physiques, mais aussi pour retrouver une stabilité psychologique…
Après le 13 novembre: le scénario d’un récit attentif:
Oui, un récit attentif au chemin que Sophie prend pour reconstruire une vie, attentif aux petits détails du quotidien qui deviennent ingérables, aux drames qu’on refuse de voir, à la lente acceptation des problèmes, et aux galères rencontrées pour se faire aider.
Autant d’étapes qui nous secouent. Et si Sophie Parra, qui réussit à prendre un peu de recul et à distiller de l’humour dans ce récit, alors qu’elle a réellement vécu ce qu’elle raconte, refuse toute pitié, on ne peut s’empêcher d’éprouver un peu de compassion.
Avec l’aide de Davy Mourier au scénario, elle parvient à dépeindre ces petits moments de la vie, à l’hôpital, en famille, avec son ami, les doutes et les joies, les cauchemars, les craintes qu’elle a connues au cours de ces années.
Le suivi thérapeutique fait proprement halluciner, les psy s’enchaînent, étant encore plus à plaindre que leur patiente, alors que Sophie se bat pour reprendre pied.
La narration alterne entre le combat présent et les souvenirs, revécus involontairement ou racontés sur commande, de cette soirée noire. A chaque fois, Sophie nous dévoile d’autres aspects de cette nuit au bataclan.
Cette alternance permet de réaliser combien de fois elle a dû raconter encore et encore ce qu’elle avait vécu, tout en évitant pour nous, lecteur, l’effet de répétition.
La BD atteint son but, nous comprenons l’absurdité du système, les questionnements, les horreurs, les doutes que l’on traverse après avoir vécu un tel trauma, et on voit comment on peut reprendre pied, après un tel choc. Bien sûr, dans de telles épreuves, chacun doit trouver son propre chemin et le cas de Sophie ne peut être érigé en généralité. Mais il est important de prendre conscience de ce qu’ont pu endurer les survivants d’attentats.
Le dessin coloré:
Oui, le dessin propose des couleurs vives. Que ce soit dans le quotidien de Sophie, ou dans la terreur de la nuit du 13 novembre.
Les personnages au style semi-réaliste de Gery nous entraînent dans ces mois de combat.
L’émotion passe par ces petits moments, mais aussi par l’emploi des cadrages serrés qui renforcent l’émotion de Sophie. Ou parfois, par ces traits autour d‘elle qui font apparaître l’angoisse qui la saisit.
Les compositions de pages alternent des formats variés, adaptés aux situations décrites, cases panoramiques pour montrer la solitude de Sophie, qu’elle soit seule ou au milieu de la foule, les variations de couleur pour montrer les flashbacks dans des cases aux angles arrondis, les gaufriers insistant sur le temps qui passe ou l’inertie de Sophie lors de ses discussions téléphoniques, bloquée par la peur de sortir à nouveau.
Gery réussit un très beau travail graphique, en finesse, sur cette BD.
Conclusion d’une BD qui prend à la gorge:
En découvrant le parcours de Sophie, j’ai été effectivement pris à la gorge. La BD se finit sur un texte reprenant le témoignage de Sophie au procès des terroristes ayant commis l’attentat du 13 novembre. La conclusion d’u long parcours.
Zéda rencontre Sophie !