Et oui, ce grand cru de 2024 a été une belle surprise en matière d’exposition. Ca valait le coup de prendre un peu de recul et de revenir dessus à tête reposée. Avec Katia, on a arpenté le festival pour découvrir des lieux et des auteurs. Pour tout vous dire, Katia a battu son record personnel de visites d’exposition sur le festival. Et moi, j’ai perdu le compte…
Et pourtant, on est loin d’avoir tout vu. Alors on vous embarque avec nous pour une petite tournée de certaines expositions de cette année.
Sommaire de l'article
- 1 On commence avec L’arabe du futur !
- 2 Allez, hop, enchaînons avec le musée d’Angoulême !
- 3 Quittons le musée pour se rendre à l’espace Franquin !
- 4 Un petit détour par la chapelle Guez de Balzac…
- 5 Un triplé d’expositions !
- 6 En passant par la cité de la BD
- 7 La cerise sur le gâteau !
- 8 « Requiem » pour une expo !
- 9 N’oublions pas le pavillon Manga
- 10 Et Posy Simmonds dans tout ça ?
- 11 Finir sur un petit cliffhanger…
On commence avec L’arabe du futur !
Katia a parcouru cette exposition qui nous offre une reconstitution chronologique du parcours de Riad Sattouf, dans son contexte sociologique et politique. Des univers différents pour représenter l’enfance, l’adolescence, la vie de jeune adulte de Riad Sattouf et les évènements qui ont influencé son œuvre. L’exposition était visible jusqu’au cinq mai 2024. Une belle occasion de découvrir non seulement les dessins du scénariste-dessinateur-réalisateur mais aussi d’apprendre quels étaient les artistes qui l’aveint influencé.
Pour compléter cette visite, Katia a également assisté à une masterclass avec Riad Sattouf en personne. Il a un humour incisif et il se révèle être un observateur et un imitateur hors-pair de ses contemporains.
Allez, hop, enchaînons avec le musée d’Angoulême !
Un petit tour au musée d’Angoulême pour découvrir l’exposition consacrée à Moto Hagio.
Katia a pu parcourir cette expo avec le commissaire lors de la journée professionnelle du mercredi. Elle a ainsi pu de mieux comprendre l’univers de cette mangaka. Cette exposition lui a donné envie de lire ses ouvrages, mais la créativité de cette mangaka a été assez énorme du « coeur de Thomas » aux démêlées de la famille Poe, en passant par d’autres genres que le drama, Moto Hagio, une des fleurs de l’an 24 (car elle est née en l’an 24 de l’ère Showa, soit 1949) a notamment exploré la science-fiction. Elle fait partie de ces autrices qui ont rénové le manga Shojo dans les années soixante-dix. Il ressort que son dessin est marqué par cette période et aujourd’hui, il a, selon moi, un petit coup de vieux. En effet, nombre d’auteurs et d’autrices étaient sous l’influence du style Tezuka à l’époque, soit ils l’adoptaient, l’adaptaient ou se posaient contre et exploraient d’autres voies. Mais je reconnais que les compositions de Moto Hagio restent intemporelles et nous bluffent encore, des décennies plus tard.
Ce groupe d’autrices, « les fleurs de l’an 24 », n’a pas choisi ce nom, il est venu avec le temps, donné par d’autres. A l’époque, elles partageaient le même espace de travail, le Salon Oizumi, où étaient colocataires Moto Hagio et Keiko Takemiya de 1971 à 1973. D’autres mangaka et des assistantes ont fréquenté cet appartement, les idées ont dû fuser et c’est un renouveau du shojo qui en est sorti, pour le meilleur assurément.
Moto Hagio, avec « Le clan des Poe » et Ryiko Ikeda avec « La rose de Versailles » – plus connu chez nous sous le nom de Lady Oscar – ont lancé l’âge d’or du shojo. Elle pose les bases de ce que l’on appellera plus tard le Boy’s love.
L’exposition ne revient pas uniquement sur cette période, mais bien sur toute l’œuvre de Moto Hagio, que l’on (re)découvre au fil des planches. Une incroyable exposition riche d’enseignements, dont le seul point noir est cette manie de plonger l’espace dans l’obscurité avec des cartons écrit en police minuscules… un souci caractéristique de l’exposition du FIBD située au second étage du musée d’Angoulême. Il doit y avoir une raison cachée à cela, qui m’échappe totalement. La malédiction du musée ?
En tout cas, le magnifique catalogue d’exposition permet de revenir sur toutes les planches affichées.
Toujours dans le musée d’Angoulême, à l’étage du dessus, une autre exposition « Attraper la course – L’art de courir selon Lorenzo Mattotti » permettait de découvrir une salve de dessins autour de la course à pied.
Mattoti a utilisé plusieurs techniques différentes : fusain, pastel, peintures et d’autres pour explorer la course à pied sous différents angles.
L’exposition contenait aussi des textes d’auteurs et d’autrices autour de la course. Ces panneaux alternaient avec les œuvres de Mattoti parfois encadrées, et parfois reproduites à même les murs.
La dernière salle présentait les BD de Mattoti avec nombre de ces livres en accès libre. Le moment idéal pour se poser (enfin, avec la foule, non, on ne pouvait pas trop se poser), ou en tout cas pour jeter un œil aux travaux de l’auteur, surtout pour moi qui ne le connaissait que de nom.
Quittons le musée pour se rendre à l’espace Franquin !
Katia et moi avons fait une autre exposition en commun, celle consacrée à Hiroaki Samura. L’expo accueillait de nombreux dessins originaux dont certains mis en couleurs. Une musique a été crée pour l’occasion et baignait tout l’espace. Et il faut reconnaître que c’était une belle claque visuelle.
D’une part par la présentation des planches et des dessins, montrant le sens de la composition de Hiroaki Samura et sa technique graphique. L’exposition permettait aussi de découvrir en quoi cette BD était originale, par son langage, par ce mélange graphique et cette recherche du dynamisme et de l’énergie. D’autre part par la scénographie, de beaux espaces décorés évoquant des éléments de la BD.
D’ailleurs, de quoi ça parle cette BD ? Une histoire sombre de samouraï, de vengeance, forment le cœur du manga « L’habitant de l’infini » de Hiroaki Samura. Trente tomes traduits en Français et disponibles chez Casterman. Si vous avez le budget et la place chez vous, ça vaut le détour.
Malheureusement, pour ceux qui n’ont pas les moyens, il n’y a même pas de catalogue d’exposition qui nous aurait permis de nous consoler.
Un petit détour par la chapelle Guez de Balzac…
Katia a visité également le vidéo-mapping consacré à Shin’ichi Sakamoto. Une projection en boucle qui prenait place dans la chapelle Guez de Balzac. Katia a été accueillie par des personnes déguisées en vampire avec un maquillage très réussi. Ca l’a tellement impressionnée qu’elle en a oublié de prendre des photos. Heureusement, on est une équipe. J’y suis allé plus tard. Et quand je suis passé, les vampires n’étaient plus là, et j’ai pu faire quelques photos.
Ces projections vous plongent vraiment dans une autre ambiance, car à côté des images mouvantes sur les murs de la chapelle, il y avait aussi l’ambiance sonore qui nous entraînait ailleurs. On pouvait juste regretter que les ombres de la foule s’étalent sur les murs et parfois sur les images.
Mais ne boudons pas notre plaisir, c’est un bel hommage au manga « DRCL Midnight Children » que vous pouvez trouver chez Ki-Oon. Un très beau graphisme et une histoire horrifique qui pourrait en perturber plus d’un. C’est exactement l’ambiance qui nous était offert dans la chapelle, visages en gros plan, grand décor, mouvement, un vrai régal des yeux que l’on pouvait rester admirer plusieurs fois.
Un triplé d’expositions !
De son côté, Katia a visité plusieurs expositions que je n’ai pas eu le plaisir de découvrir.
Tout d’abord, « Bergères guerrières : la grande quête ». Que c’est bon de retomber un peu en enfance. Une exposition véritablement interactive dans laquelle, en plus de découvrir ou redécouvrir l’univers de la série, on peut jouer.
Une exposition qui permettait également de découvrir l’univers de la série « Bergères Guerrières » de Jonathan Garnier et Amélie Fléchais, un monde de fantasy où les hommes sont partis à la guerre, les femmes doivent alors s’organiser. Se crée un ordre, les bergères guerrières, qui chevauchent des boucs et défendent le village. Molly, jeune apprentie, va avoir fort à faire car une créature maléfique rôde dans les parages. L’ambiance de la BD se retrouvait bien dans l’espace d’exposition, joliment scénographié.
Puis « Croquez ! » Une exposition gourmande, pleine de dessins humoristiques et de planches de BD d’auteurs, sur le thème de la cuisine, comme le titre de l’exposition pouvait le laisser penser.
Il n’y avait pas seulement des planches, des photos évoquaient les repas pris par les auteurs. Car après tout, c’est souvent lors de déjeuner d’affaires que se signent les contrats, que naissent les rencontres et les collaborations.
Là aussi, des idées de scénographies permettaient de faire le tour de cette exposition avec le sourire.Il y avait même un dispositif pour que des dessins réservés aux adultes soient mis hors de vue des plus jeunes.
Puis l’exposition « Adolescents en guerre » proposée par l’éditeur Dupuis. Trois livres étaient à l’honneur :
– « Madeleine résistante » de Jean-David Morvan, Dominique Bertail et Madeleine Riffaud. Cette BD autobiographique permet à Madeleine Riffaud de revenir sur son incroyable destin. Pendant la seconde guerre mondiale, la jeune femme, âgée de seize ans, qui habitait alors Paris, entre dans les réseaux de la résistance.
– « Le lierre et l’araignée » de Grégoire Carle. Grégoire Carle raconte le groupe de résistants alsaciens la Feuille de Lierre. Et ce n’est pas pour rien que son choix s’est porté sur ces combattants de l’ombre, son grand-père, alors âgé de quinze ans, en devint membre.
– « Le combat d’Henry Fleming » de Steve Cuzor. L’auteur a décidé d’adapter un classique de la littérature américaine, « The Red Badge of Courage », qui se déroule pendant la guerre de sécession. Le lecteur va suivre le parcours d’un jeune soldat des forces du Nord alors qu’il va se heurter à de nombreuses désillusions.
Entre les différentes planches présentées, cette exposition nous offre un document unique : Voir les trois dessinateurs filmés alors qu’ils travaillent sur ces BD.
En passant par la cité de la BD
A côté de ces trois expositions phares, Katia a arpenté les salles de la cité de la BD pour découvrir l’exposition « François Bourgeon et la traversée des mondes ». Petite exposition pour un grand plaisir.
La projection d’un documentaire très intéressant nous informe sur l’immense travail préparatoire de François Bourgeon. A côté de cette vidéo passionnante, qui détaille aussi la méthode du dessinateur, l’exposition présentait non seulement des planches, des illustrations mais aussi des maquettes de certains éléments de décor issus des séries de Bourgeon.
L’occasion de découvrir en papier 3D les endroits où se déroulaient certains grands moments des BD de l’auteur. J’y suis passé aussi faire un tour, c’était un vrai plaisir de se replonger dans l’univers de François Bourgeon.
J’avais lu les passagers du Vent, et j’ai pu découvrir ses autres séries, que je ne connaissais que de nom.
Et la BD numérique n’était pas en reste, quoique… Juste à côté de celle consacrée à François Bourgeon, l’exposition « photomatoon » était consacré au webtoon. Un espace, on va plutôt dire un petit couloir, permettait de découvrir les grandes dates de l’histoire du Webtoon, ces BD numériques qui se lisent en scrolling vertical.
L’exposition mettait en avant quelques séries phares coréennes et proposait, sous forme de cabine de photomaton, de parcourir des webtoons numériques afin de prendre connaissance de ce format. Ces cabines occupaient l’espace central de l’exposition et c’était là une excellente idée. L’occasion de découvrir des œuvres issues de différentes plate-formes. Car pour lire des Webtoons sur votre téléphone, votre tablette ou votre ordinateur, vous avez plusieurs sites de références, dont la liste serait trop longue à vous donner. La plus connue, la (presque) première à occuper le terrain est webtoons, la plateforme de Naver, le géant sud-Coréen de l’internet.
L’exposition vous proposait aussi des Webtoon issus de la plate-forme Webtoon Factory, ouvert aux auteurs débutants de tous les pays et lancée par Dupuis. Et, plus original, des webtoons venu d’une plate-forme africaine, Zebra-comics qui met à l’honneur le webtoon camerounais et africain. Un projet lancé par un groupe de créatifs en 2016.
Mais on reste un peu sur sa faim, on en aurait voulu tellement plus.
La cerise sur le gâteau !
Alors je suis allé me consoler en me rendant en face du musée de la BD, au vaisseau Moebius, pour visiter l’exposition qui rendait hommage aux éditions La Cerise pour fêter ses vingt ans d’existence.
Une ambiance un peu sombre pour marquer le coup, mais de très belles œuvres accrochées au mur ou posées sur des présentoirs. Il y avait un travail discret mais très beau du choix des cadres et des décorations.
L’équipe de la Cerise était là pour proposer aussi des dédicaces et leurs BD. L’occasion de faire d’une pierre deux coups.
« Requiem » pour une expo !
Puis, en remontant dans le centre ville, je me suis arrêté à la chambre du commerce et de l’industrie qui présentait des œuvres de Olivier Ledroit, autour de sa BD « Requiem Chevalier Vampire » développée avec Pat Mills en onze tomes, avec une suite à venir.
On y trouvait des planches majestueuses, des illustrations époustouflantes et des décorations fascinantes, sans oublier les objets, les croquis ou encore les cahiers de travail. De quoi se noyer.
J’ai pris autant de plaisir à contempler les planches et les grandes peintures de loin, que de me plonger dans des détails, pour le simple plaisir des yeux et la curiosité de l’amateur de dessin.
Honnêtement, comment résister au charme de ces décors gothiques, de ces personnages torturés, au visage anguleux, de ses couleurs éclatantes et de ses détails minutieux sur les tenues, les armures, les véhicules, les bâtiments. Bref, une plongée dans un univers sombre, mais envoûtant.
N’oublions pas le pavillon Manga
Près de la gare, pendant ce temps, se dressait le pavillon du Manga, la manga city ! Là, dans l’entrée, vous pouviez découvrir de belles œuvres dans un petit espace à parcourir des yeux pour se mettre dans l’ambiance.
Et après, au milieu des stands, un petit pas de côté et vous entriez sur le pavillon Taïwan qui vous proposait une expo de planches d’auteurs taïwanais ainsi que de nombreuses BD de l’île.
Et avant de sortir du pavillon, une expo minuscule sur Sakamoto Days.
Et Posy Simmonds dans tout ça ?
Et comme cela ne suffisait pas, une fois le festival terminé, sur la route du retour en passant par Paris, Katia n’a pas pu s’empêcher de se rendre au Centre Pompidou pour plonger dans l’exposition de Posy Simmonds.
C’était un plaisir de voir l’hommage rendu à la lauréate du grand prix du festival d’Angoulême 2024. On passe en quatre salles des premières œuvres à des planches extraites de ses livres récents en passant par ses dessin de presse et ses illustrations.
Sans oublier, pour les plus patients, des extraits des films adaptés de ses BD. Katia repart avec du travail, après avoir lu les livres, il lui faudra aussi voir les films… Quel boulot !
Finir sur un petit cliffhanger…
De mon côté, avant de repartir, je me suis tourné vers quelques conférences. Mais ça, on en reparlera dans un autre article… :^)
un article écrit et photographié à quatre mains par David et Katia