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Maltempo, la BD d’une jeunesse qui bascule
Titre : Maltempo
Auteurs : Alfred (scénario et dessins), Laurence Croix (couleurs)
Éditeur : Delcourt
Collection : Mirages
Année : 2023
Pages : 184
Résumé d’une histoire ensoleillée :
Italie, petit village de Province, la nuit, la mer, les arbres, un chantier. Une explosion, une grue s’effondre. Le jour s’est levé et deux enfants se battent dans les herbes. Ils sont séparés par Mimmo qui passe en scooter. Mimmo est avec sa guitare, il cherche ses compagnons de musique car un grand événement va se produire dans ce village paisible (outre les attentats nocturnes)…
Le scénario d’un rêve de jeunesse :
Au rythme des rêves de Mimmo, on suit ce récit qui se déroule dans la chaleur estivale d’un village de bord de mer. Mimmo et sa guitare, ses compagnons de jeu, tous ont des vies différentes. Et Alfred sait semer petit à petit les informations qui nous font comprendre les enjeux de chacun. En même temps que l’on progresse, on comprend que les désirs de chacun ne vont pas forcément dans le sens de Mimmo, pour qui la musique est une vraie passion.
Au-delà du combat de Mimmo pour faire jouer le groupe, il y a aussi le quotidien de ce village, les problèmes de famille des uns et des autres, ce personnage perdu qui erre en faisant la manche avec une bouée autour des hanches et ces jeunes fascistes qui transportent des statuettes du duce.
Et bien sûr, il y a les filles, qui mettent le jeune Mimmo dans l’embarras quand il s’agit de leur parler.
Tous ces événements se mêlent pour donner un récit attachant, où l’on navigue avec plaisir, où les questions nous viennent mais où l’émotion est présente.
Alfred annonce qu’il clôt une trilogie Italienne, commencée avec Come Prima et continuée avec le très beau Senso. Que nous réserve ces prochaines histoires. On espère au moins autant d’humanité et de tendresse.
Le dessin contrasté :
Alfred tient aussi les pinceaux et nous offre son style habituel, ; tellement magique. Les personnages sont tracés de manière simple, une sorte de ligne claire, avec des aplats de couleur. Stylisation efficace. Autour d’eux, les décors et surtout la végétation sont étonnantes. Mélange de technique, encre, et une technique évoquant le fusain, des couleurs fortes, faisant intervenir des dégradés, et un fouillis qui rappelle la nature sauvage. Je pourrais rester des heures à contempler les paysages d’Alfred.
Et dans cette BD, la composition et la narration favorise ma passion, car Alfred prend le temps de nous faire découvrir ce village, ces alentours sauvages, cette mer dans des cases qui survolent, avancent dans ce monde, et nous le rendent de plus en plus familier. Le décor devient un élément de l’histoire, un personnage qui semble avoir quelque chose à dire, ou qui montre simplement son indifférence devant l’effervescence humaine.
Mais Alfred, en plus de ce style, que l’on connaît déjà, nous offre, dans les moments de répétitions musicales, une très belle manière de rendre le son par l’image, l’énergie du rock de ce groupe de jeunes par le dessin, les silhouettes se mùultiplient, le trait s’estompent, se brisent, se colorient, les éléments se superposent et d’un coup, on les entend joue, on sent l’importance de cette musique pour eux, l’investissement qu’ils mettent à répéter ensemble, même si chacun retourne à sa vie une fois que tout est fini.
Conclusion d’une BD qui emporte:
Alfred vise juste et nous touche au coeur. On suit avec plaisir et tristesse, voire avec un peu de mélancolie, Mimmo et ses compagnons d‘infortune, dans cet été. Et la fin ouverte nous propose plus un avenir inconnu pour ce jeune homme qu’un happy end, ce qui rend la BD encore plus forte.
Zéda rencontre Mimmo.