Scénario : Sharon Shinn
Dessins : Molly Knox Ostertag
Editions : Rue de sèvres
Année : 2018
Nombre de pages : 256
Résumé :
Dans le futur, suite à une guerre sans merci, les humains ont perdu leurs libertés. Les envahisseurs sont les Drix, grands êtres humanoïdes presque inexpressifs et brutaux. Afin d’alimenter leurs vaisseaux en carburant, les Drix doivent extraire un minerai appelé « corzite brute » renfermant lui-même le dit carburant « Kallium ». Ces êtres contrôlent ainsi la planète en abusant de la main d’œuvre humaine pour leurs usines d’extraction.
Et outre de réduire en esclavage les hommes, les Drix par leurs carrures imposantes abusent régulièrement des femmes humaines.
Le chaos règne maintenant sur terre, et le peu d’hommes libres se sont organisés en gangs. L’un des plus terribles étant celui dénommé « Kromats ».
Coline Cavanah, héritière d’une des familles humaines les plus riches du temps d’avant-guerre, et aujourd’hui orpheline, se retrouve ainsi à travailler dans les usines des Drix.
Coline est dans le collimateur du terrible Korso, mais heureusement pour elle, le Drix Ang, non dénué d’un peu d’humanité, la protège.
Un soir en rentrant chez elle, elle s’aperçoit que les Kromats ont élu campement à côté de sa demeure.
Nouvelle source d’ennuis, mais aussi de bonheur…
Elle fera ainsi la connaissance de Jann qui deviendra son protecteur et amoureux.
De plus, elle apprend que sa petite nièce est toujours vivante, et qu’elle peut la récupérer moyennant une grosse somme d’argent à fournir aux envahisseurs.
Cependant les conditions de vie ne s’améliorent pas pour les humains, et Coline rêve de vengeance pour sa famille et aussi pour changer la condition humaine.
Elle apprendra que l’un de ses amis proches en usine fait partie d’une organisation secrète résistante aux colonisateurs : les Valtis.
Notre héroïne se lance donc dans le combat…
Vu le contexte du résumé, vous êtes certainement en train de vous dire « mais il est fou ! Comment peut-il nous parler d’amour dans ce cadre-là !! »
Et bien justement ce livre transpire l’amour : l’amour et la foi en l’humanité, l’amour de son prochain, l’amour tout court etc…
Et il n’y a rien de mieux qu’une telle petite et fort sympathique fiction jeunesse pour passer ce message.
Page 10 de l’ouvrage |
Le dessin est simple, semi réaliste typique des dessins animés de pré-ado, au trait fin mais dynamique.
La ligne est fluide mais quelques angles viennent casser cette continuité et donner du mouvement et de la vie au dessin.
Les personnages sont bien expressifs, chaque portrait/regard humain porte une émotion: ici un désarroi, là un espoir, parfois de la haine etc…
Mais à chaque fois on y sent un besoin de reconnaissance et d’amour pour se rappeler qu’ils sont tous dans la même galère.
Les différentes « races » sont aussi bien différenciées, ainsi un homme sera plutôt fin, élancé et de petit gabarit face aux colons Drix, qui eux sont plutôt imposants, forts, bruts etc… Et le trait de la dessinatrice permet de différencier cela au premier coup d’œil !
Les couleurs paraissent à la fois vives et ternes, avec une dominante à chaque page, ce qui n’est pas étonnant dans un cadre post apocalyptique.
Les mises en scène sont simples, dénuées de superflu. Les arrières plans ne sont bien souvent que des ombres mais l’alchimie fonctionne, et l’on rentre facilement dans le récit.
Mais on doit cela en grande partie aussi grâce au scénario.
Page 8 de l’ouvrage |
Le scénario, bien que partant sur des bases « classiques » de fiction s’avère être finalement d’une complexité hors norme, et surtout très moralisateur !
Il peut être comparé en quelque sorte à notre société avec ces barrières riche/pauvre, peuple/pouvoir, technologie/archaïsme etc… Révélant ainsi de nombreuses injustices et mettant en garde notamment sur de possibles « ras le bol » menant à la révolution ou la dissidence.
D’autre part cette histoire est aussi une excellente leçon de vie et d’humilité : Coline, ancienne « riche » s’est retrouvée du jour au lendemain sans ressources, vivant dans sa demeure décrépie par la guerre.
Elle doit donc apprendre à se reconstruire à niveau égal à tout homme et femme.
Mais ce récit est aussi une formidable histoire d’amour :
– D »une part avec le fameux triangle amoureux entre Coline, son amoureux et protecteur Jann qui mettra sa vie en danger pour elle, mais aussi avec l’amoureux déchu Ang le Drix, dont Coline n’éprouve finalement qu’une amitié puis de la haine…
– D’autre part l’amour en la valeur familiale. Celle-ci est illustrée d’un côté par la reconnaissance de certains personnages secondaires envers les gestes des bienveillants parents de Coline lorsqu’ils étaient encore vivant, mais aussi par l’énergie que l’héroïne met pour protéger et récupérer sa nièce.
– Et finalement un amour incontestable en l’humanité, illustré par cette solidarité en sous-main de l’organisation secrète des Valtis.
Enfin il est a noté la formidable générosité et délicatesse des auteurs envers leur jeune lectorat car ce n’est pas moins de 256 pages de dessins et dialogues qui nous sont fournis, sans violence visuelle malgré le contexte chaotique de l’histoire.
Tout est dans l’art et la magie de la suggestion et de la narration.
Voilà donc encore une belle preuve d’amour pour les représentants du futur de notre planète.
Page 14 de l’ouvrage |
Elle reflète une vision de notre société avec ses bons et mauvais côtés, et rappellera, par analogie, à nos cadets certains pans de notre histoire mondiale.
Une bonne lecture qui fera donc certainement cogiter nos enfants.
Ciao
Yann