vendredi 19 avril 2024

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Kobane Calling de Zerocalcare

Kobane Calling aux éditions Cambourakis
Titre: Kobane Calling
Auteurs: Zerocalcare
Éditeur: éditions Cambourakis
Année: 2016
Nombre de pages: 257
 
Résumé de l’éditeur :
 
Envoyé par l’Internationale (le Courrier International italien), Zerocalcare part aux confins de la Turquie, de l’Irak et du Kurdistan syrien pour rejoindre la ville de Kobané, à la rencontre de l’armée des femmes kurdes, en lutte contre l’avancée de l’État islamique.
À partir de ce voyage, Zerocalcare livre un reportage d’une sincérité poignante, un témoignage indispensable et bouleversant qui s’efforce de retranscrire la complexité et les contradictions d’une guerre si souvent simplifiée par les médias internationaux et le discours politique.
Le tout avec l’inimitable ton, extrêmement drôle et touchant, le langage et l’univers d’un auteur qui sait interpréter comme personne, le quotidien, les craintes et les aspirations de sa génération.


Mon avis :
 
Vous connaissez Zerocalcare ? Non ? Et bien c’est l’un des auteurs les plus populaires chez nos voisins transalpins.
Il est un peu le pendant italien de notre « Boulet »
national et tient lui aussi un blog humoristique particulièrement lu.
La BD qui l’a vu percer en France est « Kobane Calling ». Celle-ci est le récit d’un voyage reportage hors du commun dans un pays en guerre.
Le résultat de ce qu’il a vu dans la région de Kobane surprend tellement par les valeurs humanistes constatées qu’il nous sort de notre petite zone de confort et nous invite à reconsidérer notre condition d’individus au confort moderne « européen ».

Kobane Calling page 18 aux éditions Cambourakis
Page 18 de la BD

Le dessin :

Le dessin de Zerocalcare est un dessin très caricaturiste et très humoristique. Le trait est épais, exagéré et en rondeur.
Le personnage principal est bien sûr son auto-caricature, physiquement tout longiligne, fort sympathique et représenté presque comme une personne « niaise » (évidement volontairement pour jouer sur le comique de situation et augmenter l’effet des arguments forts et frappant méconnus du publique).
Pour les autres personnages, Zerocalcare a tenu à respecter les individus les caricaturant s’il avait obtenu leur accord, autrement il les représente de manière très humoristique sous forme d’animaux ou légumineux…
Dans l’ensemble, l’auteur reste particulièrement didactique y compris et surtout dans son dessin, notamment quand il dessine une carte de la Syrie, celle-ci reste simple mais suffisamment détaillée pour comprendre le contexte, ou bien les « backgrounds » (ou arrières plans) sont illustrés sommairement mais définissent parfaitement bien le cadre environnemental et situationniste.
L’effet noir et blanc accentue le coté roman graphique et surtout récit reportage. Les cases tracées à main levée donnent une jolie touche façon carnet de voyage et une originalité particulière sur leur taille plus ou moins hasardeuse, mais avec l’effet de distraire notre œil afin de ne pas tomber dans la lassitude d’un récit explicatif éprouvant.
Les effets sont accentués toujours pour donner un coté dérisoire et comique là où le message peut être dur.

Outre le voyage extra territoriale, Zerocalcare a aussi le talent de nous faire voyager temporellement et culturellement au travers de toutes les références souvent graphiques de sa culture pop/geek années 80-90 cinématographique (référence à Star Wars, Rambo etc…) ou bien picturale (la représentation caricaturale du tableau « le cri » d’Edvard Munch est juste géniale !), bédéistique/manga etc…
Cet auteur a un style de dessin qui me détend et m’apaise, et malgré l’humour, l’autodérision et l’exagération, le message est superbement passé, aussi difficile soit-il.

Kobane Calling page 7 aux éditions Cambourakis
Page 7 de la BD

Le scénario :

Dans notre cas, il n’y a pas forcément un scénario, une intrigue ou autre fils conducteur.
Nous avons à faire à une BD reportage, un carnet de voyage qui n’a qu’un but : informer.
A travers sa mission pour le célèbre journal italien, Zerocalcare en a donc profité pour nous conter son expérience et sa surprise due à sa « désinformation » Européenne.
Effectivement il a atterri dans une zone de guerre, la peur au ventre pour tout le monde face au risque plus que présent de la barbarie de Daesh et des zones de guerre et de bombardement.
Mais il y a aussi découvert un véritable combat pour la liberté avec des femmes soldats, une solidarité hors norme avec des régions laïcs et égalitaires autonomes comme le Rojava où les enfants et les femmes ont toutes leurs places et ne risquent aucunes sévisses, des politiques de partage plus ouvertes à l’écologie et avec une économie non basée uniquement sur l’or noir etc…
En bref, une réalité de terrain tout autre et bien loin des a priori des soit disant hommes « modernes ».
Le découpage du reportage est quant à lui plein de surprise, énormément accès sur un style « artisanal » parfois surchargé en bulles et commentaires avec six à sept vignettes, ou parfois réduit au plus simple (pleine page) mais toujours très communicatif.

Kobane Calling page 16 aux éditions Cambourakis
Page 16 de la BD

Zerocalcare nous offre donc un superbe ouvrage non dénoué de sens, traitant d’un sujet dramatique au plus près de l’actualité mais avec une touche d’humour pleine de bon sens et de dérision.
Il livre ainsi un autre regard sur les évènements.
Le message est très clair et percutant, et invite à réflexion quant à notre modèle social.

Ce livre est une vraie réussite et un indispensable de bibliothèque.

Ciao
Yann
 

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Yanndallex
Yanndallex
Je suis évidemment un passionné de BD depuis ma jeunesse. Un malheureux accident de vélo ma valu quelques jours d’hospitalisation. Ainsi ma famille, pour me faire passer le temps à l’hopital, m’offrit des exemplaires de la série des Tuniques Bleues. Cette série a été une révélation ! J’étais émerveillé de pouvoir lire des histoires humoristiques liées à des évènements dramatiques (la guerre de sécession, le racisme etc…). Je me régalais à suivre les aventures de mon personnage favori le caporal Blutch. Puis vint la pleine adolescence pour découvrir des séries plus sérieuses, ou toujours humoristiques, d’héroïque fantasy, SF ou policières (XIII, Thorgal, la quête de l’oiseau du temps, le grand pouvoir du Chninkel etc…). J’y ai découvert ainsi des styles graphiques plus travaillés, détaillés, réalistes, poétiques etc… une deuxième révélation pour m’ouvrir progressivement à la bd adulte. A ce jour j’aborde chaque nouvel ouvrage comme une surprise, une promesse d’une belle histoire, que l’on aime, ou que l’on n’aime pas. J’ai pris conscience au cours des années qu’une histoire illustrée de 48 pages, ou plus, n’était pas si facile à créer de manière scénaristique mais surtout graphiquement. Le talent n’est pas inné, et à chaque vignette, je contemple d’autant les années de travails des auteurs. J’admire les techniques graphiques (que je ne soupçonne parfois pas du tout), les choix de couleurs ou du noir et blanc, le travail sur les mises en lumière, la conception des mises en scène, le choix des plans, des effets, des perspectives, le découpage élaboré, les transitions des plans séquences etc… Bref mon œil s’est avisé, mais je n’en reste pas moins admiratif du travail réalisé et des sacrifices réalisés par chaque artiste pour offrir du plaisir à son lectorat, et cela même si l’histoire ne m’a pas forcément plu. J’aime aussi souvent à chercher d’où a pu venir l’idée de l’histoire, très souvent inspirée de fait divers, ou de l’histoire avec un grand H. Je suis aussi toujours émerveillé par la diversité des sujets traités par ce média. Cette disparité permet des livres souvent très intimes avec des témoignages poignants et durs, mais aussi de s’enrichir culturellement, s’ouvrir à des expériences inattendues, parfois loufoques et hilarantes, etc… Et elle nous promet encore de grande œuvres !!

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