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Au cœur du 7 octobre, Témoignages, la BD qui raconte
Titre : Au cœur du 7 octobre, Témoignages
Auteurs : Reut Bortz, Shay Charka, Ouri Fink, Moshik Gulst, Noa Katz, Michel Kichka, Guy Lenman, Nusko, Koren Shadmi, Tohar Sherman-Friedman, Yonatan Wachsmann, Ilana Zeffren (scénario, dessins et couleurs), Ouri Fink (coordinateur)
Éditeur : Delcourt
Collection : Encrages
Année : 2024
Pages : 144
Résumé d’histoires vécues:
Yossef habite à quatre kilomètres de la bande de Gaza, il travaille comme taxi et a transporté des jeunes venus participer à un festival de musique. Le lendemain matin, le samedi 7 octobre 2023, Amit, un des jeunes de la veille appelle Yossef et lui demande de venir les chercher en urgence. Au-dessus d’eux, des roquettes explosent. Yossef est habitué à ces tirs. Alors qu’il prend son taxi, il ignore encore qu’il va se retrouver au beau milieu d’une attaque militaire organisée…
Le scénario d’un récit multiple:
Cette BD nous présente douze histoires écrites et dessinées par différents artistes. Douze histoires de personnes ayant vécu la descente du Hamas sur Israël ce sinistre samedi 7 octobre. Certaines sont mortes, d’autres ont survécu. Des histoires parfois étonnantes, comme celle de Yossef, ce chauffeur de taxi arabe et musulman qui va risquer sa vie pour aller chercher la bande de jeunes israéliens qui l’appellent au secours.
Autant d’histoires que de personnes qui aident, se battent, fuient l’attaque surprise du Hamas. Beaucoup d’humanité aussi dans ces récits dépeignant les horreurs de la guerre et les victimes innocentes de ce conflit.
Certaines histoires tranchent, comme celle de Rachel où les agresseurs, les « chahids », sont montrés au départ comme de simples monstres assoiffés de sang puis on comprend au fil du récit qu’il s’agit de gens embrigadés, sous l’effet de drogues.
Nombre de ces récits nous font comprendre que les deux peuples, Palestiniens et Israéliens, pourraient vivre en paix si leurs dirigeants n’en décidaient pas autrement.
C’est un des points que cette BD nous rappelle, sans le dire ouvertement. L’autre point fort, c’est le courage et l’abnégation de ces personnes qui décident d’aller aider, en donnant des soins, en protégeant des plus faibles qu’eux, leur famille ou simplement des inconnus auprès de qui ils se trouvent. Les tragiques histoires d’Aner et d’Angel en sont de beaux exemples. L’un, Aner, retarde l’inéluctable en relançant les grenades que les « chahids » jettent sur un groupe d’israéliens réfugiés dans un abri. L’autre, Angel, parcourt les maisons pour soigner les blessés alors que les attaquants continuent à massacrer et enlever des gens. Mais chaque témoignage recueilli dans cette BD nous raconte une forme de courage devant l’effroyable, chez les adultes autant que chez les enfants.
Une telle BD de témoignages, bien que prenant une forme différente, fait forcément penser à « Gaza 1956, En marge de l’histoire » de Joe Sacco où l’auteur recherche des témoins d’un massacre de palestiniens.
Cette nuit du sept octobre a été une nuit de massacre et d’horreur pour des milliers d’israéliens. Malheureusement, cette nuit s’inscrit parmi toutes les nuits d’horreur vécues par de nombreux autres peuples : palestiniens, kurdes, arméniens, tutsis, juifs, tchétchènes et tant d’autres…
La liste est longue et ces témoignages nous rappellent qu’encore une fois, les guerres sont des décisions des gouvernements, pas du peuple qui demeure l’éternel victime de conflits qui nous dépassent. Et si les gens prennent les armes, c’est bien pour défendre leurs enfants, leurs familles, leurs amis, devant une menace immédiate.
Si toutes les armées du monde, quand on leur demandait d’envahir un territoire ou d’y semer la mort, posaient leurs armes pour laisser leurs dirigeants régler leurs problèmes entre eux, ce genre de massacre aurait beaucoup moins de chance de se produire.
Le même Joe Sacco nous rappelle également la violence de la réponse du gouvernement israélien à ces massacres et ces enlèvements d’innocents commis par le Hamas avec une autre BD « Guerre à Gaza » où il prend pour la première fois les crayons alors que le conflit qu’il dépeint n’est pas encore terminé.
Comme si il s’agissait d’un cycle sans fin dont nous ne verrons peut-être jamais la résolution…
Les dessins aux styles variés :
Un dessinateur différent porte chaque récit, ce qui donne des styles multiples, réalistes, semi-réalistes, stylisés. On a aussi plusieurs approches des couleurs: du noir et blanc crayonné aux aplats classiques, en passant par des choix de bichromie jaune et bleu.
La violence est omniprésente dans ces histoires, normal vu la situation racontée. Et le dessin, la mise en scène lui donne plus ou moins de place, jouant sur les ellipses, et montrant les conséquences, les corps au sol, les flaques de sang, ou parfois frontalement les tueries, la mitraillade et le visage perdu des victimes.
La BD met aussi en avant l’importance que prend le téléphone portable et les réseaux dans ce genre de situations. Combien d’appels au secours ont pu être entendus grâce au téléphone, combien de message wattsap ont permis de tenir informés les membres d’une famille, d’un groupe d’amis. Chaque dessinateur le raconte à sa manière mais il en ressort qu’en plus du courage et de l’abnégation de nombreuses personnes, le smartphone a aussi changé la donne cette nuit-là. La couverture met cela en avant avec l’image sobre d’un téléphone portable brisé.
A la fin de cette BD, une double page permet de prendre connaissance de ces dessinateurs et dessinatrices israéliennes à travers des courts paragraphes de présentation.
Suit une autre double page de photos permettant de voir les visages réels des personnages dessinés et de les reconnaître.
Conclusion d’une BD renversante:
Cette BD présente des témoignages humains. On voit comment de simples personnes, en plein conflit, décident de risquer leur vie pour aider l’autre, par devoir, par vocation, par amour pour leur prochain, par nécessité, face à d’autres humains ayant pris les armes pour tuer et détruire. Cela nous rappelle en même temps la laideur et la beauté de l’âme humaine.
Zéda croise Yossef, le chauffeur de taxi.
