Matthew Tobin Anderson revisite admirablement cette vieille légende bretonne de la cité d’Ys.
Il existe de nombreuses versions de cette légende et les « puristes » s’apercevront bien vite des différences existantes entre cette version et « l’originelle ».
Le scénariste a donc puisé son inspiration dans trois des interprétations parmi toutes les récits existants :
– Le Foyer breton, Contes et Récits populaires d’Emile Souvestre,
– Les Grandes Légendes de France d’Edouard Schuré,
– Le Roi d’Ys, livret pour l’opéra d’Edouard Lalo de Edouard Blau.
Au-delà de l’histoire mystérieuse pleine de magie, M.T.Anderson revient sur les liens psychologiques liés aux fratries.
En effet l’histoire focalise essentiellement sur la relation entre Rozenn et Dahut, deux sœurs que tout oppose.
Rozenn, l’héritière « légale » du trône, aspire à une vie naturelle et simple, et par conséquent s’éloigne du faste et des obligations dues à son rang.
Dahut, quant à elle, se sait être la cadette et donc sans prétention au trône. Possiblement par une pointe de jalousie, elle profite du désintérêt de son aînée pour essayer de prendre en main le royaume…
Dépassée par les évènements, elle va finir par reprocher à sa grande sœur son « laxisme » au point d’en devenir encore jalouse, et aller ainsi droit à la catastrophe…
Ce scénario illustre bien les tensions qu’il peut exister dans les familles quand un héritage d’un fort enjeu est à se disputer…
La narration de la légende est essentiellement graphique, afin de bien faire ressortir le côté enchanté de l’histoire.
Les dialogues n’en sont pas pour autant laisser en reste.
La magie tient donc la part la plus essentielle de la saga. Sans elle, l’angoisse ne se créerait pas. Elle est donc omniprésente dans toute la fable.
Tantôt obscure, tantôt joyeuse, on sent parfaitement l’équilibre du bien et du mal, du yin et du yang (d’ailleurs ce symbole me rappelle étrangement les flots tumultueux du récit…), dans la nature environnante, à l’image de la dualité entre ces deux sœurs.
Mais plus on avance dans l’épopée, plus cet équilibre tend à se rompre, et conduire à une conclusion certaine.
Les protagonistes n’y échapperont pas sans sacrifices pour rétablir l’équilibre harmonieux… Et c’est là, pleinement, que le suspens réside et que l’auteur nous dévoile tout son talent !!!
Malgré tout, en connaissance du final attendu, le lecteur s’y prend espoir, et en sera récompensé ou pas…
En bref la revisite de ce mythe est particulièrement bien imaginée et conçue.
L’artiste a réussi à conserver un superbe suspens jusqu’au bout, et cela même quand le lecteur en connait déjà le final.