: Orgueil et Préjugés
Stacy King (scénario) d’après Jane Austen, Po Tse et son studio
d’assistants (dessin)
Soleil Manga
: Shojo
2016
: 368
du dix-huitième siècle, dans le bourg de Longbourn, les Bennett
élèvent leur cinq filles. Madame espère bien faire un mariage
socialement réussi qui permettra entre autres de sauver la propriété
familiale que ses filles ne peuvent recevoir par héritage… Les
cinq filles, à savoir Jane, Elisabeth, Lydia, Kitty et Marie sont de
caractères bien différents. La petite vie tranquille des Bennett va
être bousculée quand Monsieur Bingley vient louer le domaine voisin
de Netherfield. Monsieur Bingley, de rang social plus élevé,
devient pour Madame Bennett celui à qui elle va faire épouser l’une
de ses filles et elle choisira de présenter Jane à Monsieur
Bingley. Un bonheur n’arrivant jamais seul, Monsieur Bingley est
accompagné de sa sœur Caroline mais surtout de monsieur Darcy,
autre riche jeune homme. Nouveau mariage en vue pour madame Bennett,
avec sa seconde, Elisabeth, mais Darcy est beaucoup plus imprévisible
que Bingley et sa rencontre avec Elisabeth va faire des étincelles
loin du coup de foudre attendu par Madame Bennett…
avis :
histoire que certains d’entre vous connaissent déjà par ces
nombreuses adaptations, que ce soit au cinéma ou même en websérie, l’œuvre de Jane Austen ne cesse d’attirer. N’ayant pas lu le roman
original, je ne vous ferai pas de comparaison. Mais ce manga présente
bien les Bennett, Darcy et Bingley et les rebondissements qui
émaillent l’histoire ne vous laisseront pas en reste. Alors
effectivement, l’histoire de base amène cette adaptation du côté
Shojo mais finalement, on parle d’amour, de réflexion entre le
mariage de raison et le mariage d’amour et surtout l’orgueil et les
préjugés sont bien présents. Ce qui a l’avantage d’une part de ne
pas faire mentir le titre et d’autre part, de créer des obstacles
pour l’héroïne que sommeille en Elisabeth.
En
effet, parmi tout ce petit monde, c’est bien Elisabeth que nous
suivons, ses pensées que nous partageons, attentives à ses sœurs,
dans l’attente de l’amour, naïve mais pas tant que ça,
intelligente, elle ne lâchera rien. Capable d’admettre ses erreurs
mais aux idées influencées par les mœurs de son époque, Elisabeth
n’est pas la potiche qu’on pourrait attendre, mais une véritable
héroïne tiraillée par ses conflits intérieurs.
si, aujourd’hui, les obstacles de classes sociales sont moins
violents (encore que, selon les classes dont on parle…), les
conflits d’Elisabeth parleront à plus d’un d’entre nous. Quelles
sont les raisons qui poussent le beau Darcy à l’aider ? L’amour ? Un
intérêt commun ? Une dette d’honneur ? Autant de mystères qui
vous seront révélés quand Darcy exposera ses vraies raisons. Car
Darcy le mystérieux, à force de garder le silence et de jouer les
beaux ténébreux, perd Elisabeth. Et si l’héroïne prend des
risques et n’hésite pas à dire ce quelle ressent et pense, Darcy
est à l’inverse. Il encaisse et ne dévoile rien. En bref, si
Elisabeth laisse parler ses préjugés, Darcy reste dans sa tour
d’Ivoire, bloqué par un certain orgueil… Préjugés, orgueil…
Vous voyez où je voulais en venir.
qui est sûr, c’est que les centaines de pages de Jane Austen ont
sûrement été réduites pour tenir sur ces plus de trois cent pages
de BD mais il nous en reste assez pour suivre une histoire, voir son
déroulement et parfois, être même surpris par certains événements.
Les fans de Jane Austen redécouvriront avec plaisir cette adaptation
et jugeront de la fidélité au roman initial et ceux qui ne
connaissent pas peuvent découvrir, au travers de cette BD, un
classique de la littérature anglaise, et peut-être aller ensuite se
confronter au roman…
dessins de Po Tse et de ses assistants restent tout à fait dans les
codes manga. Les personnages stylisés aux grands yeux plein
d’émotions et pour les besoins d’humour (les tensions sont parfois
si fortes qu’il faut détendre l’atmosphère), les personnages
réduits et caricaturaux fonctionnent parfaitement. Si, de prime
abord, on peut être surpris de retrouver ce mode de fonctionnement
pour illustrer un roman classique de 1813, on se prend vite au jeu et
ce ne me fut pas difficile d’accepter la mise en place de ses petits
codes. D’autant que cela permet de rendre des personnages un peu
monomaniaques, avec leur idée fixe, comme Madame Bennett, plus
attachante.
apprécié aussi la composition et les cadrages qui s’inscrivent dans
la logique Japonaise, tout en gardant un côté européen et, contre
toute attente, ce mélange passe très bien à la lecture, tout
absorbé que vous serez par les états d’âme et les tiraillements
intérieurs d’Elisabeth.
finalement, pour ma part, j’ai passé un bon moment avec la famille
Bennett, même si je ne suis pas la bonne cible pour une oeuvre
tirant sur le Shojo et la comédie romantique dix-huitième, mais si
vous appréciez ces ambiances, ces belles robes qui volent au rythme
des violons dans des scènes de bal, ces drames nocturnes à l’ombre
des belvédères des immenses jardins Anglais, alors, vraiment, ne
vous privez pas !
chez les Bennett !