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Tango, la BD des choix de vie d’un couple
Titre : Tango
Auteurs : Fulvio Risuleo (scénario), Antonio Pronostico (dessins)
Éditeur : Sarbacane
Collection : –
Année : 2023
Pages : 232
Résumé d’une histoire de choix :
Lele et Miriam visitent un appartement. Ils vont aménager ensemble, c’est un grand pas pour eux et bien sûr, les questions et les doutes sont là. Que vont-ils décider ? Les choix s’ouvrent et c’est à vous, lecteur, de tester les différentes décisions du couple…
Le scénario d’un récit arborescent:
Lele et Miriam forment un couple disparate, de caractère différents, et qui s’aiment. Mais font-ils le bon choix ? Cet appartement va cristalliser les tensions, mais aussi faire ressortir leur amour. Nous naviguons dans cette histoire, un pas en avant, deux en arrière, un sur le côté, car certaines pages vous proposent un choix et selon ce que vous déciderez, rendez-vous vous est donné à une autre page. Oui, on est sur le modèle de la BD dont vous êtes le héros, sauf que vous n’incarnez personne, mais vous suivez le couple dans ses hauts et ses bas. De page en page, de bond en bond, nous avançons comme dans une danse, ce fameux tango qui donne son titre à la BD. Le couple s’éloigne, se rapproche, se trouve, se perd, mais la sensualité entre eux deux est là. Parfois triste, parfois drôle, parfois absurde, parfois hautement improbable, les choix se suivent et ne se ressemblent pas.
Vous souhaitez refaire l’histoire et tenter d’autres choix ? C’est possible, quand un fil narratif s’achève, une carte vous est proposée pour que vous puissiez vous repérer et choisir le prochain embranchement que vous souhaitez explorer.
Le tango fait une pause et à un moment, l’histoire reprend une narration linéaire, pour exploser totalement dans un final où des moments de vie s’enchaînent sans s’arrêter, le couple dans une pose quelque part dans l’appartement, le temps d’échanger une réplique, et s‘enchaînent ces situations du quotidien. Ce passage final nous fait réaliser combien la vie peut être répétitive sans vraiment se répéter. Une même réplique qui revient, dit par l’un ou l’autre, dans une pose renouvelée, implique tout un pan d‘histoire différent en sous-entendus.
Fulvio Risuleo aborde la thématique du couple sous un angle riche en rebondissements, sans jamais verser dans le mélo. Il traite de l’incompréhension de l’autre, de nos propres préjugés et autres idées reçues, de la difficulté de s’accorder avec la personne que l’on aime. Le tout dans une approche originale qui mêle différentes formes narratives et graphiques.
Le dessin aux jambes allongées :
Et justement, en parlant de formes graphiques, Antonio Pronostico dessine cette curieuse BD avec un graphisme varié. Le récit est en noir et blanc, enfin pas en blanc car les pages changent de couleurs, saumon, bleues pale ou roses. Le style n’est pas réaliste et les personnages ont tous des jambes allongées, plus que de raison (pour pouvoir mieux danser peut-être, qui sait ?). Mais on entre assez vite dans ce parti-pris. Les phylactères aux queues faisant des méandres et se croisant avec celles d’autres phylactères surprend aussi, mas fait sens, dans la lignée des longues jambes.
Ce que l’on remarque aussi au bout d’un moment, c’est le passage du temps, aux différences dans les personnages : lunettes, coupes de cheveux pour Myriam, barbe, moustache, pour Lele. Nous suivons le couple non dans des choix qui influencent le jour d’après, mais bien dans des choix de vie qui impactent les années suivantes.
Les décors minimalistes réduits à quelques traits pour une plinthe, un coin de mur, un cadre de fenêtre prennent soudain de l’ampleur, un meuble bien défini, l’apparition des ombrages, un immeuble vu de pied.
Je vous ai expliqué au début que la BD était en noir et rose/bleue/blanc selon la couleur de la feuille mais à un moment, rebondissement, la couleur débarque. Quand ? Je vous laisse la surprise. Mais c’est tout d’un coup une magnificence de teintes se mélangeant, ciels rouges, peaux bleues… Le style change aussi, plus de trait de contour, mais les couleurs pour délimiter les corps et le décor. Un effet appuyé rappelant le pastel mêlé à des effets plutôt issus du numérique pour faire onduler les reflets dans l’eau par exemple.
En tout cas, cette nouvelle approche nous entraîne aussi dans son sillage, et on prend soudain un nouveau plaisir aux images.
Les compositions simples, tournant autour de la déclinaison du gaufrier, mais pouvant offrir des dessins pleines pages ou des pages composées de deux cases de même dimensions (version presque minimaliste du gaufrier).
La mise en scène dans les cases joue sur des choix simples, adoptant souvent une vue en perspective prise de dessus pour redescendre parfois dans des gros plans à hauteur des personnages. Peut-être le rappel que le lecteur, omniscient dans cette histoire, décide des chemins narratifs et observe de loin ces deux personnages ? Mais si ce choix crée une distance avec les protagonistes, on n’en demeure pas moins proche de Lele et Miriam, confrontés à des choix que nous avons peut-être, souvent, sans doute déjà vécus.
Conclusion d’une BD originale:
Tango est une belle surprise, la narration arborescente puis linéaire, tout en nous gardant spectateur, nous entraîne au cœur de la vie du couple. Le graphisme aux choix drastiques crée une ambiance particulière, avec là aussi ses changements de style radicaux, qui nous emmènent de surprise en surprise. Un tango que l’on ne regrette pas d’avoir dansé.
Zéda croise Miriam !