: Qui ne dit Mot
Delcourt
: Mirages
2015
: 144
: 17,95€
se rend avec sa compagne à la campagne pour rencontrer ses
beaux-parents. Il s’inquiète de comment il va être reçu et perçu.
On le comprendrait à moins. La rencontre se passe plutôt bien si ce
n’est ces échanges verbaux entre John qui semble à côté de la
plaque quand on lui parle et les beaux-parents bien curieux. Mais à
quoi pense-t-il, John ? Où a-t-il la tête ? C’est au petit matin,
quand nous le retrouvons pour une folle journée pleine d’embûches,
que le mystère s’épaissit. Rien ne va plus, sauf que ce n’est pas à
la roulette que John joue…
avis :
se déroule devant nos yeux et nous suivons John dans son périple où
rien ne fonctionne. Mais ce n’est pas ce qui nous perturbe le plus.
Les réactions de John à cet environnement fou ne dénote pas d’une
pleine possession de ces moyens. Si tout cela a un sens, il se révèle
au fur et à mesure de l’histoire. Et lorsque vous refermerez le
livre, vous n’aurez pas forcément de réponses claires. Une partie
du chemin de ce voyage, ce sera à vous de le faire ! Hé oui, fini
la lecture passive, la compréhension de cette BD est entre vos
mains, plutôt entre vos neurones. Et je vous invite à aller
échanger avec vos amis qui l’ont lu afin d’étaler sur la table vos
interprétations et de comparer le tout, sans mélanger.
Derrière le scénario de
cette histoire curieuse se cache Stéphane de Groodt, que j’ai
découvert il y a quelques années avec la série « File dans
ta chambre ».
développé son panel et son talent et fait sa force d’un humour
absurde. Je n’ai donc pas été surpris de sentir sa patte dans cette
histoire.
c’est aussi de retrouver dans ces dialogues l’ambiance des anciens
films de Bertrand Blier. Rappelez-vous, des ovnis comme « BuffetFroid », même si les enjeux sont fort éloignés et que la
dérive de « Qui ne dit mot » est plus surprenante, voire
désarçonnante.
invite à relire une deuxième fois cette BD une fois que vous aurez
fini le tome, et vous profiterez encore plus de l’humour de certaines
situations.
Groodt a réalisé un tour de force.
fait d’avoir une fin où tout s’explique sans s’expliquer m’a laissé
un peu sur ma fin, justement. Mais en y repensant, cet effet de
surprise a bien fonctionné, puisqu’il m’a surpris. Et puis, on ne
peut reprocher à l’auteur d’avoir poussé le curseur de
l’originalité aussi loin qu’il pouvait. Et encore, il a dû se
retenir, à mon avis.
forfait, De Groodt s’est entouré d’un seul homme, Grégory
Panaccione. Un nom qui résonnera à vos oreilles (enfin, si vous le
lisez à voix haute) avec un écho de déjà entendu. Sa dernière BD
est une collaboration avec Lupano, « Une Histoire d’Amour »,
one-shot muet. Au crayon, Panaccione choisit un style dynamique et
vif, lancé et élancé. Si tout démarre dans le calme et un certain
statisme gaphique, tout bascule très rapidement quand l’histoire
chavire.
reprend le dessus et tout saute. Le style est assez loin d’un
réalisme âpre mais ce choix caricatural sert le propos, parfois
tout aussi tranché.
héberluée de John submergé par les événements vaut bien son
pesant de cacahouètes. Panaccione fait un magnifique travail à la
peinture et il est de nombreuses cases où quelques coups de pinceau
créent la magie.
trois bandes de une à deux cases, à quelques exceptions près nous
offrant de beaux dessins pleine page, voire double page ! C’est donc
le cadrage qui donne le véritable rythme de cette BD ! Il n’y a qu’à
voir cette scène où John monte les escaliers à cause d’une panne
d’ascenseur. Le décor similaire des interminables couloirs
d’escaliers étant identiques, c’est sur autre chose qu’il fallait
jouer. Et le duo s’en sort très bien.
préciser deux points capitaux, petits plus à cette BD. Tout d’abord
la préface de Patrice Leconte, drôle, pour ne donner que cet
adjectif pour la décrire. Et deux pages finales reprenant le
scénario de la BD illustré des premiers dessins de Panaccione. Ca
se parcourt vite, mais c’est fort instructif. Des mots et des
situations illustrés en marge de l’écrit.
Ou presque ! « Qui ne dit Mot » est donc une petite
découvert bien sympathique, un peu déstabilisante, partant d’une
idée originale qui aurait pu être plus creusée. Mais je ne peux
m’avancer dans cette direction sans vous dévoiler la fin de
l’histoire, et ça, je m’y refuse… Alors, bonne lecture.
semble tiquer devant les indications de John.