vendredi 11 octobre 2024

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Oualou en Algérie, la chronique d’enquête !

couverture de Oualou en Algérie" de Gyps et Lounis Dahmani chez la boite à bulles
Titre:
Oualou en Algérie

Auteurs :
Gyps (scénario), Lounis Dahmani (dessin), Drac et Reiko Takaku
(couleurs)

Editeur :
La boîte à bulles

Collection
: Contre-pied

Année :
2017

Pages
: 64





Résumé :

Nadir
Oualou est détective privé dans la Seine-Saint-Denis. Une cliente
vient le trouver dans la cave qui lui sert de bureau pour lui
proposer une affaire : Partir en Algérie pour retrouver sa fille,
Mina, retenue par son père, Saïd. Elle lui raconte son histoire et
espère ainsi le convaincre d’accepter cette mission.

Mais
si il y a une chose que Nadir ne souhaite pas, c’est bien se rendre
dans son pays d’origine. Après avoir écouté la pauvre femme, il
refuse sans remords mais c’est compter sans sa mère, qui n’a pas
l’intention de laisser son fils abandonner la veuve et l’orphelin !

Nadir
campe fermement sur ses positions et… finit par s’embarquer pour
Alger, à la recherche d’une jeune fille dans un pays qui lui est
totalement étranger.



Mon
avis :

Cette
BD est l’occasion de découvrir un nouveau type de détective, qui
n’a pas l’air plus qualifié que vous et moi pour faire ce métier,
j’ai nommé Nadir Oualou. Mais c’est aussi l’occasion d’en apprendre
plus sur l’Algérie et son histoire récente. Au travers de la
recherche de Mina, de l’histoire de son père Saïd, c’est tout un
pan de l’histoire Algérienne qui s’ouvre à nous. Une histoire à
laquelle Nadir est aussi peu familier que nous. Une histoire complexe
que ce récit tente de synthétiser, d’en faire ressortir les
horreurs comme l’absurdité. Plusieurs lectures sont nécessaires
pour bien retenir tout ce qui s’est passé sur ces trente dernières
années.

Mais
ce récit, qui fait appel à l’humour pour faire passer son message,
se lit facilement. Les situations poussées à l’extrême du rire
permettent de désamorcer le drame latent, et si on se demande
jusqu’au bout quel va être le fin mot de l’histoire, de
rebondissement en rebondissement, on se laisse emporter par ce
suspense.


Par
contre, le rire étant présent, on ne s’inquiète pas plus que cela
pour Nadir, électron libre balancé par le rythme des déclarations
des uns et des autres. Ce personnage fait son apprentissage non de la
vie mais de son pays d’origine. Et au travers de cet apprentissage,
c’est le lecteur qui apprend. Quand la réalité rejoint la
fiction…

Car
à l’image de ce pays qu’on peut voir et découvrir sous plusieurs
angles, les intervenants de cette histoire ont chacun une version du
récit, une partie de l’histoire, et une vision des événements, de
la vie de Saïd, ce père en fuite.



C’est
là où le récit, selon moi, se révèle plus malin que prévu.
Cette enquête oscille entre le présent et le passé, mais un passé
déconstruit, éclaté dans les mémoires des uns et des autres, au
fur et à mesure que Nadir progresse. Et finalement, on se demande
s’il ne s’agit pas là d’un reflet de la situation actuelle, un pays
dont chacun détient une partie de l’histoire, rendant toute
reconstruction difficile. Mais je m’avance en terre inconnue. Ce qui
est sûr, c’est que ce récit vous apprendra des choses. Et grâce au
contraste des remarques de premier plan et des événements de second
plan, vous aurez différentes occasions de rire. Plutôt de sourire,
car on ne rit jamais à gorge déployée. On sourit des situations et
du regard des uns sur les autres, des Algériens sur Nadir, de Nadir
sur les Algériens. Tout cela montre une incompréhension dû à une
méconnaissance de l’autre. Mais dans la bonne humeur. Et il est
assez difficile d’aborder l’horreur dans la bonne humeur. Là, Gyps
s’en sort bien, car derrière une blague, les crimes de sang ne sont
jamais loin. Et les antagonistes de Nadir, quatre frères
quasi-semblables différenciables par leur taille et menés par un
petit nerveux, vous rappelleront sans doute un autre quatuor
légendaire de la BD. Cette petite troupe, qui semble plus comique
que dangereuse, se dévoile soudain au détour d’une case comme ce
qu’ils sont, des criminels.


Page de Oualou en Algérie" de Gyps et Lounis Dahmani chez la boite à bulles



Le
dessin de Lounis Dahmani correspondent à l’histoire, oscillent entre
le drame et la comédie. Les personnages expressifs, dynamiques
restent stylisés. Mais le rythme du récit nous entraîne toujours
en avant. Les décors simples de prime abord, en couleurs, jouent
pourtant souvent, discrètement, sur le contraste avec le noir. De
nombreuses cases distillées placent les personnages en ombres
chinoises. Dans les décors, ombres marquées, traits épais des
contours, renforcent aussi l’impression d’une menace sourde qui pèse,
dans ce pays où le soleil semble omniprésent et les espaces larges.

Les
couleurs posées comme des aplats fonctionnent très bien. Et la
simple variation de la forme des cases pour passer du passé au
présent permet de n’être jamais perdu.



Cette
BD simple à première vue aborde de manière soit discrète, soit
tranchée plusieurs des problèmes de l’Algérie. Les auteurs
balancent avec talent entre le stéréotypes et la réalité. Nadir
Oualou est une belle manière d’aborder la complexité cachée de ce
pays que l’on connaît trop peu.



Zéda
croise Nadir !



"OUALI OUALA", strip de Zéda pour illustrer chronique 7BD sur "Oualou en Algérie" de Gyps et Lounis Dahmani chez la boite à bulles




David

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David
Davidhttp://www.davidneau.fr
Scénariste pour le jeu vidéo, le podcast et le cinéma, auteur-réalisateur de court-métrages animés, auteur dessinateur la BD numérique "Zéda, l'Odyssée du quotidien", enseignant à l'ICAN en BD numérique, et chroniqueur BD bien spûr. Sans oublier passionné de musique et de... BD ! Tout est dit.

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