festival haut en couleur qui, cette année, a pris fermement pied
dans le vingtième grâce au bel accueil de la médiathèque
Marguerite Duras !
Le lieu du délit, vu de dehors et… |
pour démarrer, BD6Né nous a proposé une ouverture en fanfare le
vendredi 10 juin avec la projection des films en compétition. Une
sélection variée soumise au jury qui va sans doute avoir du mal à
trancher. Au programme :
- « Ama »
de Emilie Almada, Liang huang, Mansoureh Kamari, Julie Robert,
Juliette Peuportier et Tony Unser,
- « Shudo »
de To-Anh Bach, Charles Badiller et Hugo Weiss, - « Une vie de chien » de Thierry Gracia,
- « Taupes »
de Léo Verrier,
- « L’œil du cyclone » de Masanobu Hiraoka,
- « Dans les eaux profondes » de Sarah Van den Boom,
- « Cour de récré » de Francis Gavelle et Claire Inguimberty,
- « Curse of The Flesh » de Yannick Lecoeur et Leslie Lavielle,
- « Dans ton regard » de Julien Arnal.
grande journée du samedi offre plusieurs activités. Entre les
projections, les rencontres et les masterclass, vous pouviez allez
vous délasser en parcourant le village BD, où les auteurs en
dédicaces étaient installés à l’abri du soleil ou bien parcourir
la médiathèque pour découvrir les deux expositions du festival.
Le barnum du village BD, avant l’arrivée de la foule ! |
Tout
d’abord, l’exposition Panic! Reverse. L’idée, c’est de créer
l’affiche d’un film qui n’existe pas ! Détournement humoristique,
œuvre d’art, clin d’œil et référence, en tout cas, dix œuvres
originales choisies par les membres de panic! reverse. Et là, si
vous vous sentez d’attaque, vous pouvez choisir l’une de ces affiches
et… En réaliser la bande-annonce. Pour plus d’infos, allez faire
un tour sur le site de Panic! Reverse…
Une patie de l’expo Panic Reverse ! |
l’exposition Simon Roussin et Avril Tembouret. Les deux artistes ont
joint leur talent pour nous parler et nous montrer une certaine
vision du cinéma, autant à travers l’illustration graphique de
scènes classiques du septième art mais aussi à travers quelques
belles pages de textes nous évoquant ces œuvres magiques, des
projets de films qui ne verront jamais le jour. Ou du moins qui ne
l’ont pas encore vu !
L’exposition de Simon roussin et Avril Tembouret, mélangeant texte et images |
parlant de films qui n’ont jamais vu le jour, le festival nous a
réservé une belle surprise, la projection d’un documentaire sur un
film inabouti, le Dune de Jodorowsky ! Je connaissais le Dune de
Lynch et j’ai découvert avec ce documentaire qu’avant Lynch,
Jodorowsky (rappelez-vous , Jodorowsky, l’auteur de L’Incal et le
réalisateur de « La Montagne Sacrée » entre autres)
s’est attelé à la folle tâche d’adapter le livre de Frank Herbert.
En a résulté une folle aventure de deux ans et demi relaté dans un
documentaire de 90 minutes réalisé par Frank Pavich. Une plongée
vertigineuse dans la folie douce – douce, pas si sûre – et
l’ambition démesurée de cet homme qui était parti pour réaliser
l’impensable, et fut stoppé net pour des raisons… Enfin, je ne
vous en dirais pas plus, allez voir ce documentaire d’une manière ou
d’une autre, ça vaut le détour.
avant de me confronter à l’œuvre de Jodorowsky, je me suis rendu
plus tôt dans l’après-midi à la table ronde sur le scénario. Un
moment intéressant avec trois invités. Olivier Bocquet, l’auteur de
« la Colère de Fantomas » avec Julie Rocheleau au
dessin, et qui a travaillé avec Rochette pour sortir le nouveau tome
du « Transperceneige ». D’ailleurs, la boucle est bouclée
car Jean-Marc Rochette était invité du festival BD6Né lors de sa
deuxième édition, si je ne m’abuse !
Hui Phang, auteur polyvalente allant de la BD au cinéma en passant
par le théâtre et les installations diverses et variées ! En BD,
elle vient d’achever avec Frédéric Peeters un album Western
intitulé « l’Odeur des garçons affamés ».
pour finir, Thomas Cadène, dessinateur devenu auteur de BD,
scénariste de la soap-BD moderne et numérique « Les Autres
Gens », adapté pour le papier chez Dupuis. Il a écrit aussi
« Romain et Augustin » et plus récemment « La
Vraie Vie » avec Grégory Mardon, édité chez Futuropolis et
accessible chez votre libraire habituel.
Olivier Bocquet, Thomas Cadène et Loo Hui Phang prêt à discuter narration ! |
premières questions, après les présentations, tournent autour du
choix du support. Comment et pourquoi choisissent-ils un média
plutôt qu’un autre ? Pour Thomas Cadène et Olivier Bocquet choisir
la BD est le média plus facile pour arriver à l’œuvre finie. Tous
deux ont connu, dans des circonstances différentes, la difficulté
de mener à terme un projet audiovisuel ou cinématographique. Les
budgets élevés et les décideurs nombreux peuvent pousser une
création dans un tiroir. En BD, il y a beaucoup moins
d’interlocuteurs, scénariste, dessinateur, coloriste et éditeur
travaillent de concert et échangent sur la BD, sans se soucier de
devoir changer l’histoire pour rameuter tous les publics. Pour Loo
Hui Phang, la BD est également une rencontre avec un dessinateur.
Elle imagine ses histoires de BD en pensant à un style graphique, à
une patte particulière qui va apporter quelque chose de plus à son
histoire.
sont d’accord sur l’importance des échanges entre scénaristes et
dessinateurs. Et bien sûr, chacun les gère à sa manière. C’est un
des autres éléments forts qui ressort, chacun a trouvé sa sauce
pour écrire un scénario de BD, adaptant ses connaissances acquises
dans un autre média aux spécificités – ou contraintes – du
neuvième art.
Bocquet précise une différence fondamentale entre cinéma et BD.
Dans l’image filmée, la préoccupation principale est le temps.
Combien de temps va durer le film, la scène, le plan ? En BD, le
modèle change car à ses yeux, c’est l’espace qui devient capital et
non plus le temps. Il s’agit pour lui d’une autre façon de penser.
L’espace, la taille d’une BD, son nombre de pages, son découpage.
Combien de cases, combien de place va prendre une séquence, quelle
taille de cases dans la page pour raconter un plan ?
la question de savoir si la BD était la passerelle entre le film et
le roman, tous ont une manière différente de répondre que ce n’est
pas le cas. C’est une vision réductrice de la BD que de la réduire
à une simple passerelle. Il s’agit bien, pour ces trois auteurs,
d’un art à part entière. Et étant un art complet, elle peut offrir
de belles œuvres originales, et Thomas Cadène prend l’exemple de
« Ici » de Richard mac Guire (chez Gallimard), histoire
d’un lieu vu d’un même angle au travers des âges.
Thomas Cadène écoute ses collègues |
Hui Phang rappelle que tout montrer n’est pas forcément bien. Même
si l’image dessinée procure cette liberté, elle trouve que la
suggestion aura toujours plus de force que la simple exposition. La
suggestion impose une part de mystère et crée ainsi le désir de
découvrir. Elle prend l’exemple du « Camion » de
Marguerite Duras, avec Depardieu. L’acteur est face à l’auteure
assis à une table, et ils lisent son adaptation du camion. Le tout
entrecoupé d’images de route montrant un camion qui roule. On ne
voit rien du film qu’ils lisent mai cela apporte une dimension
fascinante à l’histoire.
Loo hui Phang partage son point de vue |
contre, à la question du genre en BD et en cinéma, Olivier Bocquet
et Thomas Cadène tombent d’accord que le genre est lié à
l’histoire de la BD, à sa parution en feuilleton mais aussi à une
vision différente du marché. Olivier Bocquet résume cette
différence à deux questions : « Dans quelle case rentre mon
histoire ? » en BD et « Dans quel marché je peux
m’insérer ? » pour le cinéma.
Hui Phang prend un malin plaisir à subvertir le genre. Elle fait
démarrer ces histoires tout en respectant les codes et discrètement,
elle sort de ses codes, introduisant d’autres idées bien éloignées
du genre choisi, amenant petit à petit le lecteur à accepter une
vision bien différente de ce à quoi il pourrait s’attendre au
départ.
viennent les questions du public , tournant autour des changements
que peuvent apporter l’éditeur ou le dessinateur à l’histoire.
Thomas Cadène est intéressé par les retours de l’éditeur. D’abord
car c’est toujours intéressant d’avoir un autre point de vue après
avoir travaillé en solitaire ou à deux pendant des mois sur une
histoire. Ensuite, au début d’un projet, quand il faut convaincre
l’éditeur, c’est intéressant aussi de voir quelles sont les idées
à défendre et de se renforcer sur les idées fortes de son histoire
tout en identifiant les faiblesses.
Olivier, l’éditeur accompagne, contrairement au cinéma. Parfois, il
lui arrive même de passer par l’éditeur pour transmettre un
message au dessinateur !
Bocquet explique le paradoxe de la BD. Les éditeurs veulent des
séries et en même temps ils n’en veulent pas. En effet, faire une
série qui marche, c’est une locomotive qui peut permettre à
l’éditeur de financer d’autres projets moins porteurs. Lancer une
série est risqué, et si le premier tome ne décolle pas, il faut
abandonner le projet, frustrant ainsi non seulement l’éditeur mais
aussi les auteurs et le public ! C’est pour cela que sont arrivés
les cycles. Un cycle de deux ou trois tomes pour lancer le récit et
tâter le marché. Le cycle se boucle et peut être une fin si les
ventes ne s’envolent pas. Et si ça marche, alors il peut y avoir un
deuxième cycle.
Olivier Bocquet concentré sur le débat |
dernière question du public sur les caractéristiques qu’il faut
pour être scénariste !
des trois auteurs propose sa réponse. Il faut avoir envie de
raconter quelque chose, il faut du désir, de la persévérance, de
l’humilité, de l’adaptabilité mais tous les trois tombent d’accord
sur le fait qu’il ne faut pas rêver en vivre bien ! Les périodes de
vache maigres sont nombreuses. Ce qui amène à une qualité clé :
Pour être scénariste, il faut être patient.
sur ce message que la conférence se termine et que je quitte
l’auditorium de la médiathèque. Mais la journée comportait aussi
la projection d’un documentaire, « Le Dominion de Seth » et
une rencontre avec Victor Hussenot, auteur de « La Casa »,
« Le Pays des lignes » ou encore « Le Gris
coloré ».
la journée du samedi nous a offert aussi une belle projection
consacrée au jeune public, où vous auriez pu voir :
« Como Hacer la tempeta » de Christopher Angel,
Kévin-Mark Bonein, Matthieu Gogneau, anthony montaner, Julien Moulet
et Tristan Saint-Léger,
« Kong-Fu » de Samuel Smith,
« Une noce en enfer » de Yannick Boireau, Pierre Butet,
Magali Garnier et Clémence Maret,
« Celui qui domptait les nuages » de Nicolas
Bianco-Levrin,
« Mars 3252 » de Nicolas Bianco-Levrin,
« L’âge de raison » de Mathilde Petit,
« Il était trois fois » de Julien Rembauville,
« Crin crin » de Iris Alexandre,
« Dernière porte au sud » de Sacha Feiner
journée du dimanche a elle aussi réservé de très belles surprises
! Tout a commencé avec la projection thématique « Chasseurs
de chimères » composée de fan films, d’hommages à des
univers de genre marqués. Et, cerise sur le gâteau, réalisateurs,
acteurs ou producteurs de certains des films projetés étaient
présents !
programme, « Powerless » de David Sarrio. L’histoire
d’un super héros qui perd son boulot de… super-héros !
film, dont l’idée de départ devait donner une web-série, a été
produit grâce à une campagne Ulule.
David Sarrio nous explique l’histoire et l’aventure du tournage de « Powerless » |
fut l’occasion de découvrir aussi « Rocambolesque », un
film de Loïc Nicoloff qui nous ramène au 19ème siècle, où nous
suivons l’écrivain de feuilletons pour journaux Ponson du Terrail,
auteur des populaires aventures de Rocambole. Mais Ponson est bien
mal payé pour son travail quotidien et son patron ne veut pas
l’augmenter. S’engage alors un bras de fer entre l’auteur et son
éditeur ! Une histoire… rocambolesque qui nous renvoie à certains
problèmes d’aujourd’hui !
eûmes aussi droit à un film d’animation mettant en scène les
déboires d’un poisson, courant vainement (ou pas) après une sirène.
C’était « Sirenashow » de Yann Goodfaith ! Où le réalisateur est venu
nous expliquer sa démarche, son idée étant de montrer que
pourchasser ses rêves n’est pas forcément une bonne idée !
Yann goodfaith, réalisateur de « Sirenashow » partageant avec nous le thème de son film. |
cela pour finir avec « The Fall Of Men », réalisé par
Yohan Faure et Vianney Griffon. Pour les fans de dragonBall, ils
retrouveront là en image réelle les prémisses de la saga -ou de
l’arc, comme on dit communément aujourd’hui – Cell.
film totalement auto-financé qui a nécessité deux à trois ans
pour aboutir à ces 28 minutes.
Bastien Guio (Dr Brief), Christophe Perez (Krilin), Yohan Faure et Vianney Griffon, les deux réalisateurs de « The Fall Of Men », heureux de nous raconter cette folle épopée ! |
un clin d’œil à « Cenizo » de Jon Mikel Caballero. Une
histoire à cheval entre un monde pas si éloigné que ça du nôtre
où nous suivons un père qui protège sa petite fille – mais de quoi
? – et une invasion extra-terrestre dans les années cinquante, au
travers des pages d’un comics que parcourt la petite fille.
le temps d’un tour au village BD pour voir les nouveaux auteurs en
dédicace, ce fut l’heure de la cérémonie de clôture…
qui fut l’occasion de retrouver le jury pour la remise des prix.
furent les heureux nominés de la compétition ? Voici la réponse
selon le jury composé de Olivier
Bocquet, Aurélia Mengin, Camille Moulin-Dupré, Barbara Sadoul,
Pascaline Saillant et Avril Tembouret !
De gauche à droite, Olivier Bocquet, Camille Moulin-Dupré, Julien Savès, Aurélia Mengin, Avril Tembouret, Barbara Sadoul et Marion Buannic |
PRIX – « Curseof the Flesh » de Yannick
Lecoeur et Leslie Lavielle
SPECIALE – « Dansles eaux profondes«
de Sarah Van Den Boom
DU RETARDATAIRE – « Rayures«
de Didier Philippe
CHIMERES – « Rocambolesque«
de Loïc Nicoloff (vote
du public)
DU PUBLIC – « Danston regard« de
Julien Arnal
DU JEUNE PUBLIC – « L’âgede raison« de
Mathilde Petit
la cérémonie de clôture fut aussi l’occasion de découvrir deux
films. Tout d’abord, le documentaire de Avril Tembouret sur les
couleurs de la page 52. Avec Evelyne Tranlé, sœur de Jean-Claude
Mézières et surtout coloriste de talent, Avril a suivi la difficile
phase de mise en couleur du dernier album de Valérian. Faisant suite
à son documentaire précédent qui a capté la création de l’album,
Avril conclut ainsi son voyage dans l’univers de la page 52 de
Valérian.
Avril Tembouret s’apprête à nous présenter Evelyne Tranlé… |
Tranlé était présente pour parler de son travail, de sa passion :
la couleur. Elle nous expliquait les conditions de tournage.
Difficile pour elle qui a l’habitude de travailler au calme et en
musique de devoir se concentrer avec un cameraman présent et de
répondre en même temps aux questions du réalisateur !
vient le film de Camille Moulin-Dupré « Allons-y ! Alonzo ! »,
un bel hommage animé à un de nos grands acteurs français :
Jean-Paul Belmondo.
Camille Moulin-Dupré nous raconte les contraintes traversées pour réaliser son court-métrage ! |
la projection se conclut avec une bande-annonce pour le documentaire
« Le Mystère Picsou » de Morgann Gicquel ! Un
projet en pleine création. Alors si vous aimez Don Rosa, l’homme qui
a donné vie pendant tant et tant d’années à l’Oncle Picsou, allez
sur le site pour signaler votre approbation envers un tel projet.
Morgann gicquel nous raconte ce qui l’attend pour la réalisation de son documentaire. |
vint le grand moment du concert dessiné ! Butch Mac Coy, sa guitare
et son fidèle compagnon de musique, multi-instrumentiste, nous ont
offert un concert folk-rock décoiffant pendant que The Ensaders
illustrait sur une longue fresque le paysage que leur inspirait cette
musique !
Butch Mac Coy chante et derrière, The Ensaders dessinent ! |
Le concert terminé, nous pouvions voir la fresque achevée… |
conclusion pour cette quatrième édition. Bien sûr, l’image de la
fin pour la vaillante équipe qui a mis en place ces quelques jours
de plaisir et de découverte, sous l’impulsion de Julien Savès et
Marion Buannic. Sans toute cette bande souriante qui s’est investie à
fond autant en amont que pendant le festival, rien n’eut été
possible et sans leur travail, je vous aurais écrit un article un peu creux pour vous
parler d’un week-end pluvieux mais ensoleillé par moment à la place de ce retour sur la quatrième édition d’un festival qui va sans doute encore nous étonner pour son retour l’an prochain !
Alors merci à toute l’équipe du festival BD6Né (et au jeune batteur en herbe qui semble s’être trouvé une vocation) ! |