section complète de 22 hommes de l’armée française manque à l’appel.
Cette section, commandée par le lieutenant Messonier, est composée
essentiellement de harkis dont, parmi eux, un ancien membre du Front de
Libération National Algérien (FLN) : Mohan Djeddar.
à tour, il enquêtera sur l’étrange lieutenant Messonnier (surnommé
« Azrayen’ : L’ange de la mort » selon une croyance Kabyle) via la
maîtresse de celui-ci, Takhlit Allilat, jeune institutrice Berbère. Ceci
nous amènera à en connaitre ainsi un peu plus sur ce « Azrayen’ » et
ses cas de conscience face aux atrocités commises dans le cadre de cette
guerre.
se tournera vers le passé de Mohan Djeddar, allant jusqu’à le soupçonner
de trahison de l’armée française au profit du FLN, et en intervenant
dans le village Kabyle de son enfance.
Giroud tombe un jour sur des photos et des notes prises par son père
lors de son épopée, en tant qu’appelé de l’armée française, de la guerre
d’Algérie. Ces photos vont être le point de départ de ces fabuleux
ouvrages. Bien que l’histoire dans ces livres soit une fiction
scénaristique, elle n’en est pas moins fortement inspirée par de
véritables personnages et de véritables lieux.
Giroud a donc effectué d’énormes recherches sur le sujet, avec tout son
talent « d’historien », et allant jusqu’au point de physiquement se
rendre en Algérie, avec son père, pour retracer, cadrer et faire
remonter les souvenirs de celui-ci. Le travail est stupéfiant de
réussite.
Giroud, l’un de mes scénaristes actuels préférés, réalise un sans-faute
sur le sujet. Outre le travail de recherche décrit plus haut, la
fiction qu’il propose reste plausible et tellement réaliste que l’on
pourrait croire à une histoire vraie.
talent va jusqu’à nous raconter un extrait de cette guerre sans parti
pris, sans politique, sans apologie du bien et/ou du mal… Il laisse au
lecteur la possibilité de se faire sa propre opinion sur le sujet.
références au FLN et son armée (ALN), ou Mouvement National Algérien
(MNA) etc… sont nombreuses mais peu ou pas orientées politiquement.
en elle-même est surprenante (et encore plus surprenante lorsque l’on
connait le travail de minutie effectué) et la fin de l’histoire est
tellement inattendue qu’elle inspire un sentiment d’injustice, de
frustration, de non-aboutissement, et amène surtout à se poser des
questions existentielles sur les bienfaits ou non de ce genre de
conflits…
pari de scénariste est donc réussi de par la tenue en haleine du
lecteur jusqu’au bout du livre, et de par le magnifique travail de
mémoire de ces épisodes de l’histoire malgré la fiction du scénario.
ayant changé son style de dessin par rapport à ses précédents ouvrages,
réussi parfaitement dans cet exercice de la ligne claire. Il créé des
dessins réalistes avec un trait fin, précis, souple et détaillé. On y
remarquera encore le travail de recherche et de minutie au travers des
véhicules, des uniformes, du matériel militaire, des tenues des
algériens et des différences de type des origines des personnages (type
maghrébin ou européen). Les couleurs choisies mettent bien en évidence
l’environnement dur, difficile, désertique, hostile de la Kabylie, et
rappellent fortement les couleurs du maître du genre des BDs sur
l’Algérie : Jacques Ferrandez avec ses « Carnets d’orient ».
cette BD, j’ai apprécié particulièrement, aussi, le supplément écrit
par Frank Giroud expliquant le comment du pourquoi de ce livre. On lit
ce supplément comme au travers des yeux d’un petit garçon qui voit son
père en héros.
plus émouvant est de lire les rencontres et les témoignages que Frank
Giroud et son père ont faits lors de leur séjour en Algérie. Ils s’y sont
confrontés à des gens simples et humains, fiers de leur patrie, mais
tolérants et accueillants. (Pour l’anecdote, ces pages racontent, entre
autre, la rencontre d’un ancien membre du FLN agissant en même temps que le
père de Frank Giroud qui était alors dans l’armée française opposée… 2
« ennemis » sympathisant finalement autour d’un thé… )
mon sapin, j’y ai donc trouvé cet ouvrage sur la guerre. « La
guerre ? », me suis-je dit, « beau message de paix pour un Noël… », mais
à la lecture de celui-ci mon opinion a changé. Ce livre n’est
effectivement pas un livre sur la guerre, mais un travail de mémoire
splendide et un message de paix somptueux.