vendredi 19 avril 2024

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Mémoires de Viet Kieu T4, Les engagés de Nouvelle-Calédonie, la chronique qui se souvient

Mémoires de Viet Kieu T4, Les engagés de Nouvelle-Calédonie, une BD sur une page oubliée de l’histoire

Série : Mémoires de Viet Kieu
Titre : T4, Les engagés de Nouvelle-Calédonie,
Auteur : Clément Baloup (scénario et dessins)
Éditeur : La boîte à bulles
Collection : Contre-coeur
Année : 2020
Page : 64

Résumé d’un regard sur le passé:

Sur
les routes de Nouvelle-Calédonie, une voiture roule, transportant trois
hommes, une personne âgée, son petit-fils et un dessinateur, Clément.
Au travers de leur périple, remontent trois histoires, celle de Thi Gia,
jeune Indochinoise qui s’embarque pour la Nouvelle-Calédonie afin de
travailler pour la France en 1938, celle de Van Bach ouvrier exploité en
Nouvelle-Calédonie qui va voir se développer les protestations des
travailleurs forcés, et un point d’histoire sur comment s’est
reconstruite la communauté Indochinoise après la fin de la guerre. Pour
finir en revenant à ces trois voyageurs qui atteignent leur destination.

Scénario de moments d’histoire:

Si
la BD démarre sur une vue du Caillou, autre nom donné à la
Nouvelle-Calédonie, elle enchaîne rapidement sur ce que furent les
conditions de travail de tous ces émigrés, plus ou moins forcés,
originaires d’Indochine, qui vinrent travailler au développement des
mines de Nickel et d’autres minéraux pour la France. On a l’impression
au fur et à mesure des pages que les droits de l’homme ne s’appliquent
pas à tous les hommes.
Tous ces travailleurs qui rêvaient de richesse
vont vite déchanter. S’ils étaient payés, même un salaire supérieur à
ce qu’ils pouvaient gagner dans leur pays (colonisé par la France, ceci
dit en passant), les conditions étaient terribles : surveillés, brimés,
fouettés, ils ont plus vécu comme des bagnards condamnés aux travaux
forcés que comme des ouvriers Français. Et ce pour cinq ans. Les trois
récits que l’on nous raconte, les quatre en comptant ce voyage en
voiture à travers le pays, fil conducteur se déroulant de nos jours,
nous donnent un aperçu de cette histoire de France qui ne fleurit pas
dans nos manuels scolaires.
Les tranches de vie concernant Thi Gia et
Van Bach sont édifiantes. Parfois les choses se terminent bien, mais
parfois, elles se terminent mal. A travers cette série, Clément Baloup
effectue un véritable devoir de mémoire et revient sur un passé peu
glorieux, mais ainsi, il permet de remettre en avant tout ce que ces
hommes et ces femmes ont subi et le lourd bagage qu’ils portent
aujourd’hui, au-delà des générations.
Je
regrette presque que la troisième Histoire, celle faisant le point sur
les années suivant 1946, ne soit pas vu par le regard d’un témoin. On a
bien sûr des faits historiques et leur influence sur le quotidien de ces
engagés pas toujours volontaires, mais il me manque un personnage pour
faire le liant.
L’émotion revient quand on retrouve le vieil homme
et les deux autres voyageurs qui arrivent au terme de leur route. Un
autre moment fort de cette BD. La vie d’une personne qui évoque celle de
milliers de personnes à travers un souvenir, un hommage.
Un moment où l’auteur se met en scène lui-même, témoin d’une situation émouvante où le passé marque le présent à jamais.
Le récit se conclut sur une postface de Tess Do, Maître de conférence en études françaises à Melbourne, Australie.

Le dessin en touches lumineuses et colorées:

Clément
Baloup nous offre un voyage dans le temps mais aussi dans l’espace
puisque tout se passe sur cette île de Nouvelle-Calédonie. La première
page nous entraîne dans un dessin stylisé, où l’aquarelle apporte les
couleurs par touche. La mer aux bleus violacés, rehaussés de blanc,
donnant sur des montagnes sombres, sous un ciel nuageux, donne une
ouverture magnifique. Les personnages semi-réalistes nous plongent dans
ces lieux et dans la difficulté de ces situations.
Les décors se
parent d’un jeu de couleurs créant des ambiances très belles, très
douces, contrastant fortement avec la dureté de ce que vivent les
protagonistes.
La mise en scène nous permet d’aller des vues sur
l’île, les montagnes, la mer à des plans plus serrés sur les
protagonistes des histoires, leurs douleurs, leurs luttes. En restant
sur l’humain, mais en le replaçant dans ces paysages, Clément Baloup
colle à l’histoire et à l’émotion tout en gardant le côté grandiose de
cette île, qui ajoute à l’isolation des personnages, loin de leurs pays.

Conclusion d’une BD de mémoires:

Les
Engagés de Nouvelle-Calédonie nous ramène dans l’après-guerre en
Nouvelle-Calédonie, cette BD redonne la parole à ces travailleurs moitié
ouvriers, moitié esclaves partis loin de chez eux pour servir un autre
pays sur une île du bout du monde. Cette démarche visant à nous rappeler
le passé est essentielle pour mieux appréhender le présent.

Zéda rencontre Van, un des engagés de Nouvelle-Calédonie au destin tragique.

David

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David
Davidhttp://www.davidneau.fr
Scénariste pour le jeu vidéo, le podcast et le cinéma, auteur-réalisateur de court-métrages animés, auteur dessinateur la BD numérique "Zéda, l'Odyssée du quotidien", enseignant à l'ICAN en BD numérique, et chroniqueur BD bien spûr. Sans oublier passionné de musique et de... BD ! Tout est dit.

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