Scénario et dessins : Will Argunas
Editions : KSTR (Casterman)
Année : 2010
Nombre de pages : 113
Résumé :
Décembre 2000, New York…
Une jeune femme asiatique, presque nue sous un imperméable, est tombée d’un immeuble et l’inspecteur Pezzulo se retrouve chargé de l’affaire.
En vieux briscard qu’il est, il évoque un doute quant à la thèse du suicide.
Son enquête, suite aux conclusions du médecin légiste, va le conduire dans le milieu de l’industrie du porno.
D’autres part, Sa femme est handicapée, son couple bat de l’aile, il dort peu…
Pendant ce temps, Louise, jeune française en couple avec la belle artiste peintre Anita, se livre aussi à la pornographie via la société Big Tits Studio.
Sa chérie ne voit pas cela d’un bon œil mais Louise assure quelle contrôle son travail…
Louise fera la connaissance d’un grand gaillard imposant plutôt timide dénommé Ed, agent de service pour Big Tits Studio.
Celui-ci essai aussi d’écrire quelques scénarii pour ce milieu, et propose à Louise de les lui montrer chez lui.
Septembe 2001, New York…
L’inspecteur Pezzulo n’a toujours pas résolu l’affaire de la jeune asiatique, et d’autres cadavres de femmes sont découverts.
Il a oublié l’hypothèse du suicide et est maintenant sur la piste d’un serial killer qui dépèce ses victimes.
Va t’il s’en sortir ? Trouvera t’il le fameux assassin ou devra t’il changer ses priorités ?
Mon avis :
Will Argunas est bien connu pour ses thrillers plutôt sombres et est un fidèle à Casterman (ou KSTR). On lui doit entre autre « Missing », « Black Jake », « l’homme squelette » ou « in the name of… ».
Avec « Bloody September » il aborde le polar différemment, toujours de manière noire, mais il y mêle un évènement majeur mondial tout en dénonçant le système sociétal des grandes puissances…
Cette BD dérange et ne laisse pas indifférent.
Page 13 de la BD |
Le style de l’auteur est plutôt réaliste. Il s’impose tel quel, on le prend comme il vient avec son coté brut et sans chichi. Et il le maîtrise parfaitement bien cet art !
En quelques coups de crayons type hachures, un bon jeu de lumière et des couleurs sombres, il impose une ambiance glauque et terrifiante d’entrée de jeu.
Les premières pages rappellent un peu l’esprit Blade Runner avec cette mégapole étouffante et cette ambiance impersonnelle et stressante.
Le glauque est de rigueur et l’atmosphère est vraiment pesante, mais ce n’est pas pour autant que l’on arrête sa lecture.
Quelque chose attire le lecteur, le trait est fin, précis et formidablement travaillé. Les effets mélangés à la technique des hachures sont superbement réalisés et donnent vie aux intempéries par exemple (On arrive formidablement à deviner des rafales de vent en haut d’immeuble).
L’enchainement des prises de vue est cohérent et bien adapté au thriller.
Le fait que le graphisme soit contemporain (et le scénario aussi) nous permet de nous projeter dans l’histoire, éventuellement d’y associer l’actualité, mais surtout cela nous fait remonter des souvenirs que l’on ne souhaiterai pas avoir.
Les personnages paraissent réellement surmenés et oppressés par l’incontrôlable Big Apple… Tout va vite, probablement trop vite…
Le dessin tient donc la part belle à cette continuelle émotion dérangeante à la lecture de la BD.
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Le scénario tient merveilleusement bien la route. La trame énigmatique est superbement conduite.
L’enquête avance petit à petit et nous tient admirablement bien en suspens jusqu’à cette fin brutale, sanglante et surprenante, qui nous ramène immédiatement à la triste vérité, et nous laisse malheureusement pantois.
Cette œuvre est aussi l’occasion pour l’auteur de dénoncer la triste société actuelle et ses travers avec la pornographie à foison, la violence, les armes, les cadences de travail harassantes et les environnements stressants, etc…
Tout cela nous guidant irrémédiablement vers la catastrophe !
Le découpage est lui simplissime mais rudement efficace, en gaufrier pesant, dans lequel vient s’intercaler quelques intermèdes « pleine page » soulageant à moindre mesure la monotonie de l’enquêteur.
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Il est clair qu’à la fin de la lecture, l’envie de ranger ce livre et de ne plus revenir dessus est là.
Cependant je suis persuadé qu’elle mérite d’être relue plus d’une fois.
Ciao
Yann