: Philémon T3
Le Piano Sauvage
Fred (scénario et dessin)
Dargaud
1987
: 60
est revenu de son périple sur la lettre A mais sans son compagnon
Barthélémy. Ça tracasse le jeune homme de savoir le puisatier
abandonné sur une des lettres de l’Atlantique. Heureusement pour
lui, c’est son oncle Félicien qui va lui donner une chance de sauver
le pauvre hère. Philémon, grâce à la lorgnette magique de
Félicien, repart donc dans le monde des lettres et cette fois-ci, il
est bien décidé à sauver Barthélémy. Malheureusement, les
calculs de Félicien se révèlent plus qu’approximatifs et notre
jeune héros se retrouve dans l’eau, au milieu de l’Atlantique.
Comment va-t-il s’en sortir ?
avis :
aventure du Piano sauvage est une grande histoire suivie de deux
récits plus courts se déroulant dans notre monde mais comportant –
heureusement – leur part d’absurde poétique. En effet, ce qui m’a le
plus frappé en relisant ce troisième tome des aventures de
Philémon, c’est cette poésie de l’absurde, cette magie de
l’illogique. Philémon va se noyer, il est secouru par un explorateur
qui marche sur l’eau. Mais cela prend un peu de temps car l’homme ne
comprend pas très bien pourquoi Philémon persiste à ne pas marcher
sur l’eau pour s’en sortir !
C’est
le début d’une salve de mésaventures plus incroyables les unes que
les autres. Et j’ai été heureux de retrouver cet univers, cela
faisait longtemps que je n’avais pas relu cette histoire, il y avait
tellement de choses dont je ne me souvenais pas. Mais quel plaisir de
les (re)découvrir. La moindre de mes joies ne fut pas de revoir ce
numéro de rodéo, je pourrais même de dire numéro de danse.
Philémon, lâché dans l’arène face à un piano sauvage, vivant,
doit absolument jouer des accords. Mais le piano récalcitrant comme
un taureau, refuse de se laisser faire et Philémon d’esquiver, de
danser autour de l’instrument. Mais la chance ne dure pas et le piano
parvient à projeter Philémon dans les airs. Cette folle péripétie
fait d’ailleurs la couverture du tome. Regardez comment Fred,
talentueusement, met en scène cette idée, Philémon danse, tandis
que le piano bondit sur lui.
cela m’amène bien sûr au dessin. La poésie tient énormément à
ce dessin stylisé marqué de traits, totalement loin du réalisme,
et surtout à ces couleurs vives, unies, douces. A l’image de son
style, les fumées de Fred (regardez donc la couverture une nouvelle
fois) semblent bien denses, organiques et tellement irréelles. Et
pourtant, comment douter de leur nature ? A l’image de ces histoires,
la patte de Fred me tient tout autant magiquement attaché au récit.
Les aventures de Philémon sont comme des rêves éveillés que je
vis en tournant les pages de la BD.
n’ai pas une vision d’ensemble de tout ce que le neuvième art a
produit depuis Töpffer mais j’ai l’impression que Philémon reste
quelque chose d’unique, un cas à part, une folie qu’il fallait
tenter et qui a finalement trouvé son public, un exemple à montrer
de ce que la BD peut offrir de plus merveilleux, une œuvre quasiment
inclassable qu’il ne faut pas oublier. Dans les BD que je lis
aujourd’hui, l’absurde revient parfois, mais je n’ai pas trouvé des
nouvelles œuvres dans la lignée de celles de Fred.
je ne peux que vous recommander d’aller découvrir cet univers, et si
c’est déjà fait, d’aller le relire !
croise Philémon juste avant sa rencontre avec le piano sauvage !