: Le Grand Fleuve
T1 Jean Tambour
Serge Aillery (scénario), Jean-Luc Hiettre (dessin), Dany Delboy
(couleur)
Dupuis
: Repérages
1990
: 48
du dix-neuvième siècle, dans le Morvan, Les hommes s’affairent à
préparer le bois coupé dans les forêts pour lui faire descendre
l’Yonne vers Paris afin de ravitailler la capitale. C’est alors
qu’une jeune femme assiste à un étrange spectacle : Deux hommes
affairés à enlever les marques – repères que porte chaque rondin
afin de savoir à qui il appartient – pour mettre les leurs. Du vol,
quoi ! Malheureusement, la jeune femme est repérée…
ce temps, un homme retrouve son pays après des années
d’emprisonnement. Il s’agit de Jean Tambour. Il veut maintenant
reprendre sa vie et le transport maritime du bois. Mais le retour de
Jean ne sera pas aussi simple…
avis :
tome un commence avec un petit cahier de trois pages qui pose le
contexte du récit, nous explique la dure vie de ces hommes qui font
monter par le fleuve des trains de bois et les techniques qu’ils
utilisent. Indispensable à lire avant de commencer la BD car
l’immersion dans le récit est totale et peu d’explications sont
données en cours.
plus, ce cahier introductif pose aussi le personnage de Jean Tambour
et surtout son histoire.
L’intrigue
est exposée d’emblée avec ce changement de marques du bois.
L’histoire et le contexte apportent vraiment tout leur intérêt au
récit. Car malheureusement les personnages, à mes yeux, relèvent
de certains archétypes. Jean Tambour, de retour d’emprisonnement,
taciturne, vaillant, honnête et combattif, possède toutes les
caractéristiques du héros sans peur et sans reproche. Il lui manque
quelques belles failles psychologiques, quelques imperfections. Son
meilleur ami, Gustave, le vaillant faire-valoir, montagne de muscle
qui raisonne peu, nous renvoie aussi à un certain modèle de
personnage. Le Bill Ballantine de Jean Tambour ! L’intrigue amène
les soupçons de complicité sur lui mais j’y ai peu cru. La sœur de
Gustave, Marie, témoin malheureux évoquée dans le résumé,
dispose d’un fort caractère. On sent rapidement le lien qui pourrait
se créer entre Jean et elle… Son histoire est sans doute la plus
incroyable du récit, rebondissement jusqu’au bout de ce premier
volume !
parfois, les surprises m’ont laissé un peu froid. J’ai plongé dans
les aventures de ces hommes qui risquaient leur vie pour ces
rondins, l’ambiance est là, les convois, les joutes, les tensions
entre les classes mais il manque ce petit rien qui vous rend les
personnages étonnants, et donc attachants.
dessin, dense, compact, arbore un trait épais, rude, comme la vie
dans le Morvan de cette époque. Les personnages restent expressifs
et les corps dans l’action sont figés au bon moment, gardant toute
la tension d’un uppercut, de l’effort fait contre l’eau.
décors réalistes sont eux aussi réalisés trait par trait,
renforçant la densité du dessin. Les couleurs très belles, souvent
douces, mettent en valeur l’automne naissant, la fin de l’été.
composition serrée accentue également la densité graphique du
trait. Les personnages débordent des cases, bousculent celles
environnantes, pour notre plus grand plaisir. L’action est facile à
suivre, mais comprimée dans des cases de petites tailles pouvant
tenir jusqu’à quinze par page ! Un récit tassé, touffu, qui reste
néanmoins très compréhensible.
Grand Fleuve aborde un sujet original, dense avec une intrigue
nourrie de l’Histoire mais nous offre des personnages de facture
classique pour ce premier tome. L’occasion de découvrir tout un
univers rarement évoqué en BD.
rencontre Jean Tambour.