vendredi 26 avril 2024

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Black Sands – Unité 731

Black Sands Unité 731 Rue de Sèvres

Titre : Black Sands – Unité 731
Dessins et couleurs : Mathieu Contis
Scénario : Tiburce Oger
Éditeur : Rue de Sèvres
Année : 2016
Nombre de pages : 112

Résumé de Black Sands – Unité 731:

1943, en pleine guerre du pacifique entre le Japon et les États-Unis, un navire américain est coulé par un sous-marin japonais.
Les quelques rescapés de cette cruauté s’échouent sur une petite île aux mains de japonais.
Ce groupuscule de militaires va devoir redoubler de vigilance pour ne pas tomber dans les filets des ennemis… Mais ils vont vite s’apercevoir que le véritable adversaire n’est pas celui auquel ils croient…

Ainsi tour à tour, les survivants vont succomber à des attaques de… morts vivants.
Le caporal Joseph Grégovitkz va vite finir par se retrouver seul… mais il n’en sera pas pour autant au bout de ses peines…

Quelle est donc cette île ? Quel en est son secret ? Pourquoi les japonais la convoitent-ils tellement ?
Joseph Grégovitkz va-t-il revoir un jour sa bien-aimée laissée aux USA ? Pourquoi est-il toujours en vie ?

Mon avis sur la BD Black Sands

Tiburce Oger, l’auteur de Buffalo Runners également aux éditions Rue de Sèvres, mais aussi scénariste de l’excellent Canoë Bay avec Patrick Prugne aux éditions Daniel Maghen, a imaginé une nouvelle horrifique inspirée de faits réels tous aussi monstrueux…

Et pour accompagner son scénario, il a décidé, avec la maison d’édition, de donner sa chance à un jeune dessinateur de talent : Mathieu Contis, mais déjà actif dans le milieu via dédales éditions.

Le livre, la couverture :

Comme à leur habitude, les éditions Rue de Sèvres nous livrent un superbe objet. L’ouvrage, d’une bonne épaisseur avec sa couverture rigide et lisse, est fort agréable au touché.

Le dessin de couverture ne révèle absolument rien de l’histoire mais il amène des questionnements et impose déjà une atmosphère inquiétante. Ce soldat américain, seul, perdu dans la jungle au milieu d’un ruisseau avec son fusil au bras, sa gourde, son casque et son air si expressif de peur et de fatigue…

Le 4eme plat, avec un résumé succinct situant et mettant en place l’intrigue, accompagné d’un simple dessin de débarquement d’un petit groupe de soldats afin de bien illustrer le résumé. Le plus inquiétant est certainement la dernière phrase associant horreur et fait réel…

Black Sands Unité 731 Rue de Sèvres planche 13

Le dessin, le style, les couleurs, les effets, la mise en scène :

Ce qui m’a particulièrement marqué sur cette BD est cette profusion de couleurs, certes liée à l’environnement de la jungle, mais c’est surtout la maîtrise de celles-ci pour instaurer une ambiance parfois chaude avec un rendu de moiteur, et parfois sombre, froide et désagréable pour insuffler au lecteur cette étrange sensation que l’épouvante peut surgir à tout moment…
Le dessinateur joue donc très bien sur les ombres et lumières, les clairs obscurs…
L’usage du sépia est aussi bien choisi pour relater des faits historiques en flash-back dans le scénario.

Le dessin, dans un style semi-réaliste reste plutôt classique, ni trop léger ni trop épais, sans l’encombrer de détails : bref le juste nécessaire pour une bonne BD. Le travail sur les perspectives est bien effectué bien que de temps en temps les proportions pêchent un peu… mais l’ensemble reste bien fait.

Les effets sont nombreux (onomatopées, halos, etc…) mais ne sautent pas aux yeux et ne surchargent pas le dessin, ce qui veut donc dire que le choix de ceux-ci a été fort judicieux et qu’ils sont très bien exploités et placés.

Les mises en scènes sont dynamiques et vivantes, variant énormément les plans pour donner du mouvement (plan d’ensemble, plan pied, plan américain, plan taille, gros plan, plongée, contre-plongée etc…) : très bel exercice particulièrement bien réfléchi !

A noter un beau travail effectué sur les uniformes, et la présence superbement accentuée de l’environnement (la mer, la jungle, etc…).

J’adore la manière dont sont stylisées les vagues par exemple !

Black Sands Unité 731 Rue de Sèvres planche 8

Le scénario, le découpage :

L’unité 731 sert donc de base à ce scénario terrifiant.

Mais qu’est-ce que l’unité 731 allez-vous me dire ? Et bien cette unité 731 était une section de l’armée japonaise crée entre 1932 et 1933, et qui avait pour mission de rechercher et développer des armes bactériologiques immondes en les testant sur des cobayes… humains !!!! Adultes comme enfants étaient « utilisés » dans bien d’atroces manières. Vivisections sans anesthésie, injection de virus et maladies diverses (typhus, choléra, peste), etc.., étaient de communes tortures pratiquées par cette section d’assassins. Autant dire que le thème horreur de cette BD se justifie donc uniquement par ce fait réel, et que donc le mythe zombie exploité tombe en dérision face à ce que ces pauvres victimes innocentes ont pu vivre…
D’ailleurs, cette unité 731 est reconnue responsable de crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Et le plus dur est de savoir que le dirigeant de cette unité « Shiro Ishii » n’a pas été condamné, grâce à l’asile accordé par les USA en échange des notes et des comptes rendus de ses recherches…

Ainsi le thème de l’horreur est bien motivé pour cette BD, mais le plus effrayant n’est donc pas la présence de ces zombies qui ne sont qu’une interprétation possible des résultats des expériences commises par les japonais. Au contraire, ces zombies sont la touche fantastique, surréaliste et parfois comique de l’ouvrage.

L’intrigue de Tiburce Oger, finalement centrée sur le personnage du caporal Joseph Gregovitkz, rescapé d’un naufrage suite à une attaque des japonais versus son navire, est plutôt efficace et bien amenée. Le scénario peut paraître basique en première approche, et le réflexe pourrait être de se dire « Encore une histoire de zombies !! C’est du réchauffé ! ». Mais que nenni, ce récit est engagé, et nous amène à nous poser de vrais questions : Quel est le but du commando envoyé : le sauvetage ou la récupération de données ? Quel est donc le rôle des états dans ces actions ? Quelle est la valeur de l’humain ? L’armée sert-elle véritablement une population ou simplement des intérêts politiques ? Où se trouve la limite de l’acceptable ? Etc…

Bref Tiburce Oger touche un point sensible pour chaque communauté se croyant plus ou moins vertueuse, et critique ainsi indirectement les classes dirigeantes, l’aveuglement des populations, l’inaction, le mutisme et le laxisme volontaire au profit de secret militaire ou politique etc… Bref là où ça fait mal !

Le découpage réalisé sert aussi fort bien le scénario et cette cadence endiablée. Le nombre de vignettes variant de 4 à 8 par pages impose donc un bon rythme et l’alternance de vignettes petites et grandes, allongées ou massives, verticales ou horizontales, accentue cette allure infernale…

 

Black Sands Unité 731 Rue de Sèvres planche 14

Ces deux auteurs nous livrent une bonne BD très mesurée qui nous apprend ainsi une partie de l’histoire longtemps volontairement étouffée.
Ils nous décrivent à merveille un enfer sous des allures de paradis…

Ciao
yann

Les auteurs de Black Sands – Unité 731 (Source Rue de Sèvres):

Tiburce Oger

Tiburce Oger (photo de Isabelle Franciosa) editions Rue de Sèvres

 

Né en 1967, Tiburce Oger est diplômé de la prestigieuse Ecoles des beaux-arts d’Angoulême. Après un détour de quelques années par le dessin animé pour perfectionner sa technique, il fait une entrée remarquée dans le monde de la BD avec la série Gorn. Influencé par Hitchcock, Fritz Lang et Oscar wilde, il offre à ses lecteurs des westerns prenants et authentiques. Il s’est également distingué pour ses séries fantastiques (la forêt avec Vincent Perez, Les Chevaliers d’Emeraude avec Ane Robillard) et ses scénarios pour Patrick Prugne (Cano eBay, French Man). Il vit aujourd’hui en Charente.

(Photo et Copyright © : Isabelle Franciosa)

 

 

Mathieu Contis

Mathieu Contis Rue de Sèvres

Mathieu Contis est graphiste, diplômé des Beaux-Arts. Black Sands est son premier album. Il vit aujourd’hui à Toulouse.

 

Documentaire vidéo sur l’unité 731

Et pour finir, un petit documentaire sur l’unité 731 qui a inspiré cette bande-dessinée :

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Yanndallex
Yanndallex
Je suis évidemment un passionné de BD depuis ma jeunesse. Un malheureux accident de vélo ma valu quelques jours d’hospitalisation. Ainsi ma famille, pour me faire passer le temps à l’hopital, m’offrit des exemplaires de la série des Tuniques Bleues. Cette série a été une révélation ! J’étais émerveillé de pouvoir lire des histoires humoristiques liées à des évènements dramatiques (la guerre de sécession, le racisme etc…). Je me régalais à suivre les aventures de mon personnage favori le caporal Blutch. Puis vint la pleine adolescence pour découvrir des séries plus sérieuses, ou toujours humoristiques, d’héroïque fantasy, SF ou policières (XIII, Thorgal, la quête de l’oiseau du temps, le grand pouvoir du Chninkel etc…). J’y ai découvert ainsi des styles graphiques plus travaillés, détaillés, réalistes, poétiques etc… une deuxième révélation pour m’ouvrir progressivement à la bd adulte. A ce jour j’aborde chaque nouvel ouvrage comme une surprise, une promesse d’une belle histoire, que l’on aime, ou que l’on n’aime pas. J’ai pris conscience au cours des années qu’une histoire illustrée de 48 pages, ou plus, n’était pas si facile à créer de manière scénaristique mais surtout graphiquement. Le talent n’est pas inné, et à chaque vignette, je contemple d’autant les années de travails des auteurs. J’admire les techniques graphiques (que je ne soupçonne parfois pas du tout), les choix de couleurs ou du noir et blanc, le travail sur les mises en lumière, la conception des mises en scène, le choix des plans, des effets, des perspectives, le découpage élaboré, les transitions des plans séquences etc… Bref mon œil s’est avisé, mais je n’en reste pas moins admiratif du travail réalisé et des sacrifices réalisés par chaque artiste pour offrir du plaisir à son lectorat, et cela même si l’histoire ne m’a pas forcément plu. J’aime aussi souvent à chercher d’où a pu venir l’idée de l’histoire, très souvent inspirée de fait divers, ou de l’histoire avec un grand H. Je suis aussi toujours émerveillé par la diversité des sujets traités par ce média. Cette disparité permet des livres souvent très intimes avec des témoignages poignants et durs, mais aussi de s’enrichir culturellement, s’ouvrir à des expériences inattendues, parfois loufoques et hilarantes, etc… Et elle nous promet encore de grande œuvres !!

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