vendredi 29 mars 2024

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ALGUES VERTES, L’HISTOIRE INTERDITE – la chronique verte

couverture de ALGUES VERTE L'HISTOIrE INTERDITE par Leraud et Van Hove chez Delcourt

Titre : Algues Vertes L’histoire interdite

Auteur : Inès Leraud (scénario), Pierre Van Hove (dessin)
Éditeur : La Revue Dessinée / Delcourt
Année : 2019
Page : 144

Résumé :


Des tracteurs qui nettoient des algues sur une plage. Un cavalier qui avance tranquillement sur la même plage. Soudain, le cheval s’enfonce dans une couche plus profonde d’algues. D’ailleurs, ces couches peuvent faire un mètre quatre-vingt d’épaisseur si elles ne sont pas nettoyés rapidement. Un dégagement de gaz, et le cheval s’effondre, ainsi que son cavalier. Les urgences interviennent. L’homme est sauvé, pas la bête. C’est là qu’intervient Pierre Philippe, à qui cette affaire de cheval rappelle une autre affaire similaire. Une intoxication mortelle par dégagement de H2S produite par ces ulves, ces fameuses algues vertes qui viennent pourrir le littoral breton. Mais que s’est-il passé ? Ces morts d’hommes et d’animaux sont-elles imputables à ces algues ? Depuis combien de temps ? Quelles mesures ont été prises ? D’où vient cette pollution ?


Mon avis :

Le scénario :


Autant de question qui trouvent réponses, et de bien tristes réponses, dans les pages de ce reportage/enquête dessinée. Inès Leraud, journaliste et documentariste, mène une enquête approfondie sur ce vaste problème, qui a entraîné la mort de nombreux animaux – quarante – et de trois hommes !
Une enquête qui reflète notre société, et qui dévoile le dysfonctionnement totale de nos institutions.
Je ne vous résumerais pas en quelques lignes tout le travail de Inès Leraud, ce serait compliqué. Je vous recommande donc de lire cette enquête, qui fait froid dans le dos.
Cette pollution mortelle, donc, préoccupe les familles des victimes, certains lanceurs d’alerte, et plusieurs citoyens qui veulent retrouver une région littorale saine. Mais curieusement, elle ne tracasse ni les pouvoirs publiques, ni les grandes industries du secteur (géographique) souvent agro-alimentaires, ni la justice. Y aurait-il un lien ?

Oui, bien sûr. Le triste constat que je retire de cette lecture est que pour certaines personnes, il vaut mieux quelques morts qu’on essaye de balayer sous le tapis et de faire oublier que de perdre des millions d’euros en refondant tout le système agricole et industriel de la région. Car c’est bien cela qui est en cause.
L’économique, une nouvelle fois, est pointé du doigt. L’économique au sens où la politique devient affaire de billets de banque, au sens où elle se met au service de l’argent et plus de l’humain.
De ce que j’ai saisi, l’origine de cette pollution remonte bien loin, sous Charles De Gaulle, au sortir de la deuxième guerre mondiale et au lancement du plan Marshall. A l’époque, on ne pouvait prévoir les dérives, et certaines conséquences des actes qui ont été pris. Mais aujourd’hui, on le peut, et on pourrait y faire quelque chose, pas sans une refonte incroyable de tout notre système, certes, et cela s’avère extrêmement compliqué, et complexe.
On pourrait argumenter que trois morts, c’est peu pour bousculer tout le fonctionnement agricole, industriel du tissu économique breton.
Peut-être, mais le pire, c’est de vouloir occulter ces trois morts, c’est cette chape de plomb que l’on pose sans regret sur ces victimes. Jacques Thérin, 26 ans, décédé en 1989, Thierry Morfoisse, décédé en 2009 et un joggeur de 50 ans, décédé en 2017.
Ce récit documenté est instructif et nécessaire. Même si il n’est pas aisé de démêler la masse d’information contenu dans ce dossier, il est important de s’y plonger. Nécessaire car, devant le silence de nos politiciens (pas tous mais certains suffisamment influents pour étouffer l’affaire), il faut que cela éclate au grand jour.
Quant aux grands industriels, aujourd’hui, ce serait un miracle s’il se comportait comme des êtres humains dignes de ce nom, et ce n’est vraiment pas de leur côté que j’attends la (ré)apparition d’une lueur d’humanité.
L’histoire découpé en chapitres se finit avec un paquet d’annexes qui permettent de découvrir les documents (enfin, une petite partie) utilisés et cités dans le reportage.

page de ALGUES VERTE L'HISTOIrE INTERDITE par Leraud et Van Hove chez Delcourt

Le dessin :


Pierre Van Hove illustre avec talent cette enquête. Il donne vie à tous ces personnages, connus, moins connus, anonymes et nous plonge dans ce littoral maudit par les algues vertes. On croirait presque à une sorte de tranquille mangrove, mais il n’en est rien, le mal est latent, et un faux pas vous coûtera la vie. Oui, là, en Bretagne, à quelques centaines de kilomètres de Paris, en France !
Le vert, naturellement, domine dans ce récit. Des personnages esquissés, stylisés, qui prennent vie. Ce trait léger crée une distance, une distance nécessaire avec la lourdeur du propos, qui, parce qu’il est vrai, pèse sur le cœur. C’est dans notre pays que ça se passe, c’est notre société qui laisse passer ça. C’est nous !

Conclusion :


Oui, lisez cette BD. Mais faites-la lire aussi, parlez-en autour de vous. Prêtez-la, offrez-la, c’est peu, mais c’est déjà un petit pas pour réveiller nos consciences anesthésiés, et pas par le H2S, mais par ces gens qui pensent que nous les avons élus pour qu’ils considèrent ne pas avoir de compte à nous rendre.


Zéda et les algues vertes.

AH LE GUEUX VERT Strip de Zéda pour illustrer chronique 7BD sur ALGUES VERTE L'HISTOIrE INTERDITE par Leraud et Van Hove chez Delcourt


David


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David
Davidhttp://www.davidneau.fr
Scénariste pour le jeu vidéo, le podcast et le cinéma, auteur-réalisateur de court-métrages animés, auteur dessinateur la BD numérique "Zéda, l'Odyssée du quotidien", enseignant à l'ICAN en BD numérique, et chroniqueur BD bien spûr. Sans oublier passionné de musique et de... BD ! Tout est dit.

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